Le navigateur :
Hervé de Portzmoguer naît (entre 1470 et 1478) dans une une famille bretonne
de petite noblesse ayant manoir en Léon à Plouarzel et dont la devise
est « War vor ha var zouar » « Sur terre et sur mer ». Il sert la duchesse
Anne de Bretagne au château des ducs de Nantes au titre de page. Il quitte
dès l'adolescence ses fonctions pour revenir vers Brest et embarquer en
tant que mousse. Intrépide, à peine nommé capitaine, il devient pirate
en attaquant des vaisseaux de commerce français alors que le duché de
Bretagne semble voué à une absorption certaine par le royaume de France.
Le 6 décembre 1491, Anne de Bretagne épouse Charles VIII roi de France
mais préserve une relative autonomie bretonne. Hervé de Portzmoguer poursuit
ses piratages mais étoffe ses actions à l'encontre des ennemis de la France
et devient par le fait corsaire. Sa réputation croît rapidement et les
témoins de ses exploits ou ceux qui se contentent d'en faire les louanges
usent d'un nom francisé « Primauguet » plutôt que Portzmoguer jugé imprononçable.
Le navire :
Les chantiers navals de Nicolas Coëtanlem en Dourduff-en-Mer (Morlaix)
ont pour tache de construire le plus grand vaisseau de guerre jamais construit
en Bretagne pour faire la guerre à la France, tel est l'ordre de 1487
de François II de Bretagne. 40 mètres de long, 12 mètres de large, soit
700 tonneaux. Le duc meurt et c'est sa fille Anne qui suit l'ouvrage avec
intérêt. Le choix du nom est symbolique, sont proposés : La Nef de Morlaix,
La Mareschalle, La Nef de la Royn. Anne de Bretagne impose Marie-La Cordelière,
nom inspiré de l’ordre de chevalerie de la Cordelière. 200 canons 14 bombardes
à roues pour pierres lourdes pour 700 à 1000 hommes d'équipage selon sa
configuration. A flot en 1498, ses premiers combats navals se feront en
Méditerranée entre 1501 et 1505 pour reprendre Mytilène aux Turcs (1504),
ceci au service de la France.
Quelques dates :
En 1503, Portzmoguer entre dans les archives de la marine en tant que
commandant d'une escorte de cinq navires d'une flotte de commerce de 16
navires destinée à rejoindre l'Espagne. L'ordre vient du roi de France
Louis XII, troisième époux de la duchesse de Bretagne qui espère ainsi
calmer les ardeurs du corsaire Breton qui confond souvent ses intérêts
avec ceux du royaume. Cette première mission officielle est largement
rétribuée par un pourcentage sur la valeur marchande de la cargaison protégée.
En 1505 (1508 pour certaines sources). Lors du pèlerinage de Saint Jean
du Doigt Anne de Bretagne visite « la Cordelière » à quai et propose le
commandement de la nef à Hervé de Portzmoguer en tant que capitaine sur
mer (titre militaire) et maître de caraque (titre de marine marchande).
Hervé de Portzmoguer cumule les deux titres afin d'asseoir son autorité
sur toutes les nefs qu'il serait amené à commander. Ce dernier, absent,
reçoit la nouvelle avec surprise et craint un traquenard d'autant plus
que sa loyauté envers Anne et surtout envers le roi de France est pour
le moins confuse. Il prend la mer en pure fuite. La reine Anne l'apprend
et entame des tractations par messages interposés pour ramener le corsaire
à terre. Il accepte enfin le commandement avec sans doute quelques garanties
de ne pas être indisposé par des réprimandes.
Plus tard, Portzmoguer attaque un navire écossais qu'il dépouille avec
ses marins. Acte de piraterie inqualifiable. L'affaire fait grand bruit
car l'Ecosse est une rare alliée de la France contre les alliés des Vénitiens
mené par la volonté papale. Les propriétaires du navire, Jehan et Robert
Abreton, ainsi que Georges Yvon, portent l'affaire en justice par ambassades
interposées dans un premier temps. Le procès s'éternise car les biens
piratés furent, comme à l'accoutumée, vite revendus et le préjudice resta
difficile à établir. Hervé Portzmoguer et son complice Jehan Estienne
sont condamnés à payer 385 livres, 13 sous et 4 deniers le 15 avril 1508.
Un procès en appel se déroule le 4 février 1509 à Lesneven qui conforte
la sentence. Après une révision appel au parlement de Bretagne le 4 avril
1509, les plaignants sont déboutés. Portzmoguer est utile à la politique
bretonne. On lui pardonne beaucoup. La duchesse de Bretagne et reine de
France a besoin d'hommes forts pour préserver une certaine autonomie décisionnelle
en Bretagne jusqu'à frapper monnaie alors que le territoire devient peu
à peu une province royale sans le dire ouvertement.
En 1510, le 23 février, il est poursuivi pour assassinat en duel de Jehan
de Keraret. Un mandement dirigé au premier huissier ou sergent requis
pour le procureur général Yvon Kerareec et Jehan Coetdelez de la chancelerie...
Une affaire dont les suites ne sont pas connues. Et pour cause, l'année
est faste pour Portzmoguer qui rase les côtes anglaises et dépouille avec
violence trente navires anglais. Le capitaine Conhort, qui commande le
Nicolas de Hamptoncourt, navire anglais victime du pirate, en compagnie
de l’Ambassadeur d’Angleterre se plaint auprès du roi de France qui probablement
dût ricaner en toute diplomatie sachant que les navires anglais harcèlent
les côtes françaises.
Une marine anglaise qui se sent humiliée par un nobliau de campagne, ce
qui ne manque pas d'agacer Henri VIII roi d'Angleterre. En avril 1512,
le monarque désigne un tout nouveau amiral de la flotte, Edward Howard,
fils du comte de Surrey. Le noble est le porte étendard du roi pour son
panache lors des joutes royales. Un parcours militaire exemplaire au service
de son roi et des intérêts de la famille qui portera le titre de duc Norfolk...
Tout l'inverse de Portzmoguer. Officiellement, le nouveau commandant de
la flotte britannique doit avec 18 navires organiser le blocus de la Manche
jusqu'à la Tamise. L'amiral arraisonne tout ce qui flotte en Manche au
prétexte que les navires transportent des cargaisons françaises. Puis
il convoie un corps expéditionnaire vers la Guyenne (région bordelaise)
pour venir en aide au comte de Dorset qui tente de reprendre cette région
retombée aux mains des Français.
La flotte anglaise, après cette mission, se regroupe au nez de la Bretagne.
Une opération d'envergure est planifiée pour instaurer un blocus du port
de Brest mais pas seulement... Une première attaque est menée à l'encontre
du fort de Bertheaume qui tombe. Puis une autre au Conquet, à la Pointe
St Mathieu et tout particulièrement sur le Manoir de la famille Portzmoguer
le 23 mai. Une famille qui en réchappe de justesse et se réfugie au manoir
de Kermarc’har. Le 1er juin, l'amiral débarque en presqu'île de Crozon
et se lance dans un pillage barbare indigne d'une armée régulière... Tout
est brûlé et tout est passé par l'épée. Panique générale, les nobles locaux
demandent une trêve de 6 jours pour qu'une guerre loyale soit organisée.
Une fois que l'amiral a pris les positions nécessaires à sa victoire il
accepte. Les nobles réunissent des troupes avec peine et font appel à
la milice – civils requis pour faire face à l'ennemi en attendant l'armée
française. Cette milice est habituée à contrarier les petits raids anglais
mais n'a aucune formation pour le combat en ligne contre 2500 militaires
de carrière. Les retranchements anglais sont imprenables, il est décidé
d'attendre que les troupes anglaises se retirent privées de nourriture
et de renforts et de les attaquer sur les chemins menant à leurs chaloupes
de rembarquement. La déroute est complète malgré le surnombre français
(10000 - nombre qui paraît élevé), il n'y a pas de combats véritablement,
les miliciens dont certains membres de leurs familles sont déjà morts,
pratiquent la dérobade légitime. Les Anglais repartent à leur aise sans
réel butin, la presqu'île est pauvre.
L'escadre anglaise remonte vers l'île de Wight.
Les combats de St Mathieu
L'amiral Howard revient devant le Goulet de Brest le 10 août 1512 pendant
que la ville fête l'alliance de la Bretagne avec la France le jour de
la Saint Laurent.
Portmoguer est à bord de la « Cordelière » au port avec 22 navires de
la flotte normande du roi de France et la flotte bretonne. Il festoie
avec des amis et invite ceux-ci à participer à une bataille navale sur
le champ. Quelques nefs françaises et bretonnes suivent leur chef mais
l'enthousiasme va vite se noyer dans la crainte. Les navires anglais sont
au nombre de 25, plus lourds, plus armés. La « Cordelière » se retrouve
avec la « Louise » et la « Nef de Dieppe » dans le vestibule du Goulet.
La flotte brittofrançaise se disperse au large sans combattre. Quoiqu'il
en soit Porztmoguer parvient à démâter le « Sovereign » qui s'immobilise,
puis la « Mary James » n'est plus en état d'engager. « La Louise » est
démâtée par le vaisseau amiral anglais la « Mary Rose », perd 300 marins
et parvient à quitter la zone. La « Nef de Dieppe » commandée par Rigault
de Berquetot reste engagée 7 heures jusqu'au terme de la bataille sans
répit aucun. Le « Regent », vaisseau anglais des plus imposants se confronte
à la « Cordelière » à partir de 13 heures. Ce duel d'artillerie de marine
est devenu légendaire. Le « Regent » est démâté, la « Cordelière » a les
voiles en feu à 15 heures. Le « Regent » de 1000 tonneaux s'approche néanmoins
et ordre est donné de lancer les grappins sur la « Cordelière » de 700
tonneaux. L'abordage est sanglant. Les 400 Anglais prennent l'avantage.
Dès lors l'histoire raconte deux versions :
• L'incendie de la Cordelière se communique à la Ste Barbe
– la réserve de poudre du navire et provoque une immense explosion qui
coule les deux navires conjointement. Selon les sources de 700 à 2000
hommes meurent dans l'explosion. Thomas Knyvet, commandant du « Regent
», beau-frère de l'Amiral Howard et Sir John Carew, commandant en second
ainsi qu'Hervé sieur de Portzmoguer périssent en même temps.
• Portzmoguer voyant la défaite annonce à ses invités, les
épouses, les galantes et son équipage : « Nous allons fêter Saint Laurent
qui périt par le feu ! » puis allume lui-même la réserve de poudre. Les
textes anglais relatent l'épisode et y ajoutent la perte des enfants des
invités civils pendant qu'un bon nombre d'officiers Français de la flotte
faisaient la fête à terre.
L'explosion aurait fait des dégâts importants sur les vaisseaux de proximité
en en diminuant les capacités de tir et de navigation. L'amiral Howard,
en retrait sur la « Mary Rose », donne l'ordre de rompre. Howard poursuit
au large et, au cours des jours suivants, brûle vingt-sept petits navires,
en capture cinq autres et fait 300 prisonniers Bretons. Sur le chemin
du retour en Angleterre, il attaque plusieurs ports le long de la côte
française, capturant ou brûlant encore plus de navires. L'amiral avait
fait le vœu de ne pas se présenter devant son roi sans avoir vengé Sir
Thomas Knyvet, commandant du « Regent ».
Le 15 août 1512, l'amiral reçoit la rétribution d'une rente de 100 £ et
la réversion de la charge de Lord High Amiral d'Angleterre, d'Irlande
et d'Aquitaine détenu par le Comte d'Oxford, tout ceci de la part d'Henri
VIII en pleine gratitude. La gloire de l'amiral est faite à son retour
en Angleterre.
Côté français, Portzmoguer est le héros qui a sauvé Brest. La victoire
est française car des navires français subsistaient prêts à faire feu...
Le 25 avril 1513, à bord d'une barge d'abordage, lors d'un combat contre
les Français, le célèbre amiral Anglais tombe à l'eau et se noie sous
le poids de son armure.
Version française :
Trois jours plus tard le corps est retrouvé. Les Français font parvenir
le sifflet d'argent insigne de lord amiral à la reine Anne de Bretagne
et l'armure à sa fille Claude. L'amiral venait d'être promu à l'Ordre
de la jarretière. Insigne honneur contesté par certains historiens.
Version anglaise :
Le corps d'Howard est retrouvé sur une plage et identifié par le sifflet
autour du cou mais le corps n'aurait pas été rapatrié en Angleterre. Cependant,
des écrits anglais majoritaires affirment que l'amiral, avant de tomber
à l'eau, enleva son sifflet et le jeta à la mer pour éviter qu'il ne tombe
en des mains françaises.
Hervé Sieur de Portzmoguer épouse en première noce
Jehanne de Coatmanac’h puis en seconde noce Françoise de Kergoulouarn.
Il y aurait eu une descendance dont le dernier représentant du nom s'éteint
à Saint Pol de Léon en 1833.
Les épaves du « Regent » et de « La Cordelière » sont recherchées désormais
non plus aux abords de la Pointe de Saint Michel mais au Nord de la pointe
du Grand Gouin en Camaret-sur-Mer.
La marine Française honore Primauguet en donnant ce nom à un navire de
guerre.
Il semble que ce ne soit pas le poète Jean de la Fontaine
dont on honorerait le souvenir au travers de la rue de la Fontaine mais
celui d'une fontaine communautaire très pratique pour les Morgatois. Un
compte rendu municipal semble accréditer la présence d'un puisage en plein
cœur de Morgat.
Le conseil municipal de Crozon en date du 22 juillet 1934 vote un crédit
spécial de 420 francs en faveur du remplacement de la pompe de la fontaine
du Loc'h qui est délabrée et irréparable. Cette pompe alimente les Morgatois
en eau potable en l'absence d'eau courante dont la privation devient un
problème sanitaire grave. Les eaux du ruisseau du Loc'h sont douteuses
et dénoncées par les autorités sanitaires. Le maire de Crozon d'alors,
Mr Cariou, est le énième magistrat à subir la pression d'un raccordement
à une eau irréprochable. Il est alors envisagé un raccordement à un point
de puisage situé à Goandour en Crozon. Ce n'est pas le tuyau d'à côté
bien que la déclivité du terrain soit idéale. Des plans sont établis mais
le volet financier stagne comme une eau croupissante. Les eaux du port
sont pestilentielles et désagréables pour les touristes dont certains
aimeraient faire trempette jusqu'aux mollets.
Certains Morgatois ont un puits. D'autres, nettement plus à leur aise,
se sont raccordés au château
d'eau Peugeot grâce à une redevance qui n'est pas à la portée de tous.
L'industriel Mr P. propriétaire des deux conserveries en
Morgat se trouva à la une des commérages de Crozon Morgat pendant plusieurs
années. La presse régionale s'en fit l'écho.
Me Lalouët, avocat conseil de Mr Berneron, écrivit une lettre au maire
de Crozon Morgat que l'édile lut au conseil municipal du 11 octobre 1931.
"Mr P. semble empêcher l'accès des habitations situées sur la falaise.
La question n'est pas nouvelle : Mr P. a établi une rampe en cet endroit
sur un domaine dont il ne peut prétendre être réellement propriétaire
mais qu'il se réserve pour lui seul... Ce qui est encore plus mauvais,
Mr P. a supprimé le passage du bout opposé et y a construit un escalier
en pierres qui ne peut être suivi même par les piétons.
Cette situation est intolérable. Le conseil municipal en est ému. Il demande
avec insistance à l'administration supérieure d'ordonner à cet effet une
étude précise pour être soumise à la juridiction du conseil de préfecture."
Le commentaire de la presse (Dépêche de Brest ) étant accablant à l'encontre
de Mr P., celui-ci fit jouer son droit de réponse comme l'article 13 de
la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse le lui permettait.
8 novembre 1931. Lettre ouverte à Me Lalouët, avocat à Brest. — On nous
prie d’insérer [Ndlr]:
"Je viens de prendre connaissance dans la Dépêche de Brest de la lettre
que vous avez adressée au Conseil municipal de Crozon. Je suis propriétaire
de la rampe au point que, si demain fantaisie me prenait de bâtir, nul
ne pourrait m'en empêcher. Cette rampe nécessaire à l'usine a été construite
pour son usage par un entrepreneur dont je possède les reçus.
Il est exact, d'autre part, que je suis dans le bas de cette rampe locataire
du Génie maritime pour 100 m², et je paie une redevance annuelle — de
tout le reste, je suis propriétaire et détiens les titres d'achat, je
n'ai d'ailleurs jamais empêché de passer pour aller chercher de l'eau
à la fontaine. Pour ce qui est de l'escalier, la situation est tout autre.
Autrefois, ainsi que je l'ai vu de mes yeux, tout comme l'ont vu les gens
de mon âge, le chemin de la fontaine existait, mais s'arrêtait brusquement
à plus de trois mètres de hauteur et rejoignait le quai par un chemin
de chèvres semblable à celui qui existe actuellement devant Kerdour (moins
haut cependant). Le sentier le long du quai avait à peine 0 m.50. donc
jamais une voiture n'a passé par là. Le quai était constitué par d'énormes
pierres plates placées sur champ, à côté desquelles les pêcheurs venaient
débarquer et vendre leurs sardines aux saleurs.
L'usine construite, le pêcheur ne voulant plus porter sa sardine par le
chemin de chèvres, qui était très dangereux par temps de pluie, mon prédécesseur
intenta et gagna un procès contre le maire de Crozon, mettant ce dernier
dans l'obligation de construire l'escalier actuel.
Si donc l'on en revenait à l'ancien état des choses ce serait retourner
au dangereux chemin de chèvres et il resterait, comme il existe actuellement
pour les riverains, le chemin du haut, qui a toujours été le seul existant
pour les voitures.
J'espère que ces explications vous suffiront.
Veuillez agréer, monsieur, mes empressées salutations.
Mr P."
La mairie de Crozon-Morgat n'avait pas la même lecture du dossier. Le
fameux escalier aurait empiété sur le domaine maritime ainsi que le départ
de la rampe. La partie basse de la rampe était sur terrain communal inaliénable
et la partie haute, Mr Berneron en était le permissionnaire. Le conseil
municipal, par délibération du 22 mai 1932, décréta la démolition de l'escalier
en pierre et du mur de soutènement construits par Mr P. Le maire J. Cariou
envisagea l'hypothèse d'un procès au civil déclenché par le conserveur
et se réserva le droit de se faire aider par la préfecture pour user de
son droit d'option pour enfin réaliser le projet de transformer ce chemin
en voie vicinale de 6 mètres de large. L'industriel qui avait intenté
un procès administratif à Mr Berneron pour interdire à celui-ci d'y faciliter
la circulation, fut débouté.
Au cours du conseil municipal du 23 juin 1935 dirigé par le maire Mr Bergerot,
il fut décidé de faire le nécessaire administratif pour que le chemin
rural enfin élargi, entre le quai du Kador au niveau de la mer et les
fontaine et lavoir de la Montagne qui rendaient service à tout le voisinage,
fut classé parmi les voies vicinales de la commune afin de fixer son assiette
et de déterminer ses servitudes. Le mur de soutènement bien plus vertical
permit l'élargissement, l'escalier ne semble pas davantage commode.
Ce chemin est escarpé à cause d'un dénivelé important qui donna l'idée
d'appeler le quartier la "Montagne". Sans ce chemin, il fallait faire
un grand détour qui ne plaisait à personne. C'était à s'user les pieds
dans ses sabots de bois.
Aujourd'hui, la vicinale est devenue la rue de la Montagne avec son épingle
à cheveu. Chaque véhicule motorisé s'y prend à deux ou trois fois pour
assumer le fameux virage étranglé. Il faut noter que l'industriel de Douarnenez
était qualifié par la presse d'alors "d'industriel sympathique" jusqu'à
l'affaire de la rampe...
Mr P. paraissait de temps à autre dans la presse. Il fut amputé d'un bras en 1912 lors d'un accident dans son usine de Douarnenez en expliquant l'usage d'une nouvelle machine à courroie à une employée qui ne savait pas s'en servir. La directrice de l'école maternelle de Morgat remercia l'élite Morgatoise pour les dons de l'arbre de Noël de 1930. Parmi les généreux donateurs. Mr Lazard de Neuilly 100frs [financier propriétaire d'une villa au-dessus du port], Mme Péchin et Mr Potier de l'Hôtel de la mer 50frs, Mr Chabal architecte du gouvernement 50frs [architecte de nombreuses villas de Morgat], Colonel Valentin de Paris 50frs, Mr Breitling vice-président du tribunal de la Seine 20frs [famille Peugeot propriétaire de villas et d'un lotissement], Mr P. 10frs, Madame la général Hunter 10 frs, Madame de Marliade Hôtel Hervé 5frs...
Alice Coudol (10 février 1923 - 30 novembre 1944), fille
cadette d'Alphonse et Jeanne Coudol, forains de la "Loterie de Montélimar",
réside dans une roulotte rue de Kéroriou à Brest. De par la profession
de ses parents, elle arpente le Nord Finistère pour participer aux marchés
et aux fêtes communales avec pour points culminants les places de la Liberté
et Wilson à Brest. Son père meurt chez lui à Brest à 51 ans le 1 mai 1939,
il était pensionné de guerre.
La famille maintient l'activité foraine et reçoit un procès verbal des
autorités allemandes (septembre 1940) pour dépassement des prix des produits
vendus. Au vu de l'inflation galopante, les autorités allemandes publient
des tarifs fixes pour tous les biens de consommation. Les commerçants
et fermiers n'en tiennent pas compte jusqu'au jour où les sanctions peuvent
aller jusqu'à l'emprisonnement.
Des bombes anglaises tombent à côté du camp nomade en février 1941, la
cible originelle était le port de guerre stratégique de Brest où se concentre
une puissante marine allemande. La famille décide de s'installer à Lesneven
au 32 rue de Jérusalem. L'itinérance de cette famille est un point crucial
pour la résistance du groupe "S.R. Alliance". Le résistant Georges Roudaut,
pharmacien à Lesneven, propose à Alice Coudol d'être agent de liaison
avec la fraction brestoise du service de renseignements dont le représentant
est Paul Masson, laborantin. Elle accepte bien volontiers sous le pseudonyme
de "Violette", ceci en octobre 1942.
Assez rapidement, la jeune résistante est en contact avec des résistants
communistes qui tentent d'organiser des liens entre les réseaux pour davantage
d'efficacité ; le temps des tracts est terminé, la lutte armée semble
l'unique espoir de libération, mais sans armes (armes privées réquisitionnées
par l'armée allemande), sans radios (interdites)... Ce souci de mailler
les réseaux annonce la période noire de 1943 durant laquelle les groupes
tombent les uns après les autres sur dénonciation, par imprudence... Il
faut recruter, être plus précautionneux, maîtriser les contacts à trois
personnes au plus... Alice Coudol devient une recruteuse reconnue. Elle
sait convaincre les bonnes personnes. Le 13 avril 1943, "Violette" approche
Jean-François Derrien à Lannilis. Un gendarme, futur chef de Bataillon
FFI. Puis Jean Mazé, de St Pol de Léon s'investit grâce à l'intervention
de "Violette". Du passage de messages, aux recrutements, Alice Coudol
force le respect. Les semaines passant, quelques armes circulent ; Alice
Coudol prend en charge quelques-unes d'entre-elles qu'elle cache sur le
terrain des nomades à Brest.
Le réseau "Alliance" s'effondre après des perquisitions instructives.
Alice Coudol est arrêtée vers 8 heures du matin à Lesneven le 4 octobre
1943. Prison de Rennes, prison de Fresnes à Paris début 1944, prison de
Strasbourg ensuite. La Gestapo l'accuse d'espionnage en faveur de l'ennemi,
on l'affuble du matricule n° 582 le 25 janvier 1944. Ses camarades d'Alliance
subissent le même sort, celui du programme d'extermination secret "N-N
– Nacht und Nebel – Nuit et Brouillard". Suppressions par exécutions sans
procès, sans traces administratives. Transfert du groupe à la prison de
Pforzheim en Allemagne. Certains membres du groupe "Alliance" sont torturés.
Le 30 novembre 1944, levée d'écrou, 5 heures du matin, 26 prisonniers
sont libérés et transportés par camion dans la forêt de Hagenschieß à
quelques kilomètres du camp. Autour d'un trou de bombe remplit d'eau et
de neige, ces hommes et ces femmes sont agenouillés et abattus par une
balle de revolver dans la tête par cinq gestapistes de Strasbourg. Quelques
branchages recouvrent les corps.
Il semblerait qu'à Lesneven, on se sache rien, des résistants du groupe
"Alliance" sont inscrits sur la liste d'Union Gaulliste pour les municipales
gagnées du 18 mai 1945. Alice Coudol est donc conseillère municipale !
Seule sa disparition enfin établie dévoile le drame.
Le 19 mai 1945, dans la forêt allemande, les autorités françaises emploient
des civils allemands (une pratique fréquente pour rappeler l'horreur nazie
souvent niée au delà du Rhin) pour mettre les corps en cercueil. La dépouille
d'Alice Coudol est rapatriée à Brest le 5 août 1945. Une cérémonie inimaginable,
digne d'un chef d'Etat, est organisée en hommage à cette jeune-femme méritante.
La sous-lieutenante F.F.C. Alice Coudol est inhumée au cimetière de Saint-Martin,
à Brest. Dès octobre 1945, une rue brestoise porte son nom.
Forces Françaises Combattantes (FFC), Déportés et
Internés de la Résistance (DIR)
Croix de chevalier de la Légion d’Honneur à titre posthume le 6 juillet
1955
Croix de Guerre 39-45 avec palmes
Médaille de la Résistance
Le conseil municipal de Crozon du 8 juillet 2021 vote à 27 voix et 2 abstentions
la désignation d'une impasse à Morgat au nom d'Alice Coudol.
Certains noms ont un parfum de grand large... Kerguélen - les îles de la Désolation des terres australes découvertes le 12 février 1772 par le navigateur breton Yves Joseph de Kerguelen de Trémarec... Mais revenons à Morgat et ses rues pas bien larges, ses parcours découvertes loin de la civilisation comme une terre lointaine. La rue Kerguélen glisse sur le pignon de la villa Peugeot et vous envoie dans le quartier balnéaire géré par la fameuse famille industrielle...
48° 13' 56.2" N
4° 30' 0.3" O
La place d'Ys fut d'abord une plage de sable au bord de
l'estuaire du Loc'h (étang littoral). Les Romains y échouaient leurs barques
pour transporter leurs pêches jusqu'aux cuves de salaison et bien plus
tardivement, les marins pêcheurs Morgatois y séchaient leurs filets de
pêche étendus sur le sable de la plage haute qui "entrait en profondeur"
dans le village. Le premier bâti significatif fut la chapelle St Marie
abandonnée à la révolution française (1789). Elle fut remplacée par l'hôtel
de tourisme St Marine. Cette construction du 19ème siècle en bord de mer
était accompagnée d'un quai mais pas encore en continu, ceci afin de laisser
un accès aisé à la mer aux pêcheurs. L'industrie des conserveries s'était
aussi développée à cette époque de sorte que la zone était occupée par
des tréteaux sur lesquels les ouvrières des conserveries étendaient des
sardines pour les faire sécher. Puis cette activité périclitant et le
tourisme étant en forte croissance, il fut décidé d'achever les quais
et d'y adjoindre une cale de desserte pour les pêcheurs de moins en moins
nombreux. 1932, délimitation de la place d'Ys par M. Labasque fils, géomètre
de Telgruc.
Ensuite progressivement et suite à plusieurs aménagements, la place d'Ys
parfaitement délimitée désormais devint un carrefour de circulation routière
et un grand parking automobile ainsi que de cars. Ce qui fut un estuaire
est entièrement urbanisé désormais et les modifications projetées à partir
de 2008 à hauteur de 33 millions d'euros (budget prévisionnel de l'époque),
ont permis de supprimer les parkings pour plus d'espace piétonnier, en
contrepartie les aires de stationnement furent installées en retrait (2011).
En 2013, la place est alors bordée non plus d'un parapet de quai mais
d'un gradin en bois pour accéder à la plage de Morgat.
Ys : ville légendaire submergée par les flots. Le roi d'Armorique Gradlon
(330-405 ap JC) la fit construire pour sa fille Dahut aux mœurs légères.
Pour certains, cette cité se situe au fond de la baie de Douarnenez, pour
d'autres dans la baie des Trépassés. Dieu n'appréciant guère ce qui s'y
passait, enfonça la ville sous les eaux alors que celle-ci était ceinte
de digues.
• Pour une raison indéterminée un avion
de tourisme s'est posé sur la future place d'Ys en août 1929. L'attraction
fut grande au pied de l'hôtel St Marine. Selon certaines sources (à confirmer),
l'immatriculation F-AIVF de l'avion correspondait administrativement à
:
Morane-Saulnier 147 5 F-AIVF M Bailly /Nancy _Soc.Aeroplanes Morane-Saulnier
/Puteaux _L'Aile de France /Paris _Mme Marie Coltel /Paris _Louis de Bermond
de Vaulx /Paris _ Federation Jean Mermoz_Paris 10.11.28.
Si l'immatriculation était confirmée, cet avion fut la propriété d'André
Bailly, jeune pilote de raid chevronné, fils d'un industriel Nancéen,
qui collectionna les périples audacieux.
Le 18 novembre 1928, l'avion assure par étape une liaison Paris Casablanca
Marseille (arrivée le 11 janvier 1929) à titre expérimental et avec quelques
frayeurs. André Bailly revend l'avion ensuite à Marie Cotel et Louis de
Bermond de Vaulx de Paris.
La sculpture Thomas Langrand se situe en lieu et place
de la chapelle
Notre Dame de Gwel Mor déconstruite. La structure en lamellé-collé
de chêne composée de douze arches concentriques façon membrures d'embarcation
de pêche, tout en organisant un "Passage" (nom de l'œuvre) en son
cœur, tel celui d'une chapelle, est éclairée par le sol.
Les Compagnons du devoir de l’atelier Le Ber à Sizun ont fait une première
installation en mars 2020 puis suite à des problèmes techniques, la sculpture
fut démontée. Le remontage est survenu en octobre 2020 pour cause de pandémie
de la Covid 19.
L'ensemble des travaux du réaménagement de la place de la chapelle démolie ont coûté 93000€, hors électricité (47000€), hors engazonnement réalisé par les services techniques de la commune.
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