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Manoir de Quélern du Baron Emmanuel Le Gentil

Manoir de Quélern

Christophe-Paulin de la Poix Le Chevalier de Fréminville écrivit : "Le manoir de Quélern, ou plutôt Kerlern (lieu des renards, parce qu'autrefois le canton fourmillait de ces animaux), est à peu de distance des lignes. C'est le berceau de l'ancienne et noble famille Le Gentil, dont l'origine remonte au milieu du treizième siècle. Toutefois le manoir actuel ne date que du dix-septième, et a été bâti sur les ruines de l'ancien. Lors de la bataille de Trez Rouz de Camaret par les Anglais, en 1694, le comte de Langeron, lieutenant-général sous les ordres de Vauban, y avait établi son quartier-général.

En 1481, Simon Le Gentil (1), archer en brigantine, comparaît à une montre de la noblesse de Cornouailles. Yvon Le Gentil (2) paraît à la même montre et en la même qualité.

Lors de la convocation des ban et arrière-ban de Cornouailles, en 1694, nous voyons un Le Gentil figurer comme cavalier dans la première compagnie que commandait le marquis de Nevet (3). Mr Le gentil de Quélern, colonel du génie, membre de l'institut d'Egypte, et directeur des fortifications jusqu'en 1830, est le dernier descendant direct de cette famille."

Le château initial de Kélern appartenait à la famille Goulhezre et entre par le mariage dans la famille Le Gentil. Château féodal démoli, la reconstruction fut destinée à la plaisance. Le manoir avait pour vocation d'être le berceau de la famille Le Gentil.

La famille Goulhezre est une lignée d'écuyer de Bretagne dont chaque descendance mâle obtient le titre d'écuyer d'une seigneurie. Jean I Goulhezre marie l'un de ses fils (Henry) à Marie de Poulmic. Jean III Goulhezre, écuyer, seigneur de Kerlern, magistrat, décédé avant 1565, serait à l'origine de la première ferme fortifiée ou château de Quélern. Un des petit-fils de celui-ci (Alain) est sieur de Rigonou (Camaret). L'une des petites filles de Jean III, Esther Françoise Goulhezre (1637-1678), épouse Tanguy Le Gentil (1627-1712), écuyer, sieur de Pencran (Landerneau), capitaine de la paroisse de Crozon, fils d'Allain Le Gentil, écuyer sieur de Coatninon (Plomodiern) et d'Anne de Rosmorduc. Tanguy Le Gentil ajoute à son nom « de Kerlern/Kélern/Quélern » pour se distinguer des autres branches familiales. Celui-ci commande deux compagnies de gardes-marines et les milices gardes-côtes, soit une troupe de 1 300 hommes sous le commandement du Marquis de Nevet lors de la bataille de Trez-Rouz. Le mariage donne plusieurs enfants dont Jacques Le Gentil (1661-1689) marié à Clotilde Le Rousseau (1663-?). Cette union donne naissance à Tanguy Marie Le Gentil écuyer seigneur de Quelern et de Kerhernot (1690-1736). Ce dernier épouse Anne Yvonne Daniel. Tanguy Marie Le Gentil meurt donc en 1736. Sa veuve se remarie en 1738 avec Hervé Joseph de Kersauson, chevalier seigneur de Mescoat. Bref mariage, car la dame de Kélern meurt à son tour en 1739. Des enfants du couple Le Gentil sont mineurs : Jean Tanguy et Pierre... Les deux personnages seront les deux branches qui joueront sur l'avenir du manoir.

Marc Derrien époux d'Anne Folgar ( - 1741) du manoir de Trémet sont résidents du manoir de Quélern. Veuf, le sieur Derrien reste à Quélern et rachète des droits seigneuriaux avec des possédants locaux (Carn, Legoascoz, Lucas, Derrien, Folgar, et consorts...), le 1er octobre 1753, de la tenue roturière de Coatglas. Anne Folgar porte le "titre" de dame de Kerlern. Marc Derrien est un investisseur foncier pour l'essentiel. La présence du couple au manoir n'est pas explicitée.

Cependant des membres de la famille Le Gentil semblent vivre aussi au manoir, du moins, les aînés portent les titres d'écuyer et de seigneur de Kerlern. Parmi eux des seigneurs pauvres. Aussi étrange que cela puisse paraître, les Le Gentil n'ont jamais fait fortune à l'exception du dernier représentant de la lignée (Emmanuel). En cette période, on trouve Jean Tanguy Le Genty(4) (fils de Tanguy Marie), seigneur de Kerlern, marié à Marie Guillemette Le Forestier en 1755 et dont l'union donne naissance à plusieurs enfants. Le plus jeune, Pierre, a pour parrain, un pauvre de l'hôpital et pour marraine, une pauvre de l'hôpital. Cette mention de naissance enregistrée administrativement prouve le dénuement des parents à l'époque. Ce Pierre se dit écuyer mais vit et meurt dans une ferme de Brospel après avoir peut-être vécu à Quimper. Il s'est marié avec Marie Renée Augustine Melou (1741-1821) en 1771. Le couple donne naissance à Emmanuel-Jean l'Evangéliste le Gentil de Quélern en 1773.

Le manoir est à nouveau pleinement dans la famille Le Gentil par le biais de Louis-Marie-René Le Gentil, fils de Jean-Tanguy Le Gentil, qui a une formation d'avocat et qui devient en 1784, substitut du procureur du roi à la sénéchaussée de Brest Saint-Renan. Le Garde des Sceaux Lamoignon-Malesherbes annonce une réforme judiciaire d'ampleur en pleine période révolutionnaire. Sous l'incitation du Comte de Botherel procureur général du Tribunal de Rennes, avec d'autres opposants à la réforme, le jeune magistrat signe une pétition de ferme opposition pour garantir les libertés bretonnes. Après le tollé, la fuite. Dans un premier temps le magistrat se cache au manoir de Quélern mais Thomas Louis Le Mignon, futur premier maire de Roscanvel (1794-1795), y voit une menace pour la révolution d'autant que le substitut est l'ami du prête Louis Graveran notoirement peu révolutionnaire. En réalité, l'ambitieux se verrait bien racheter les terres des Le Gentil, il n'est pas le seul à lorgner sur le pactole foncier. L'aristocrate fait de la prison sur dénonciation de Le Mignon pour incivisme et espionnage en 1790. L'homme d'église est lui aussi poursuivi et interné à plusieurs reprises à Brest. Le noble porte plainte contre son "tortionnaire" pour harcèlement par deux procédures. Rien n’aboutit. En 1792, le noble indésirable Louis-Marie-René Le Gentil quitte la France pour éviter les désagréables effets de la guillotine. Il revient en Crozon vers1802 et meurt quelques mois plus tard. Le manoir et les terres assujetties sont mises sous séquestres durant l'absence du propriétaire. Ce sera le cousin Emmanuel-Jean l'Evangéliste le Gentil de Quélern (1773-1843), fils de Pierre Le Gentil relégué à la paysannerie forcée, qui rachètera la propriété à titre privé. L'illustre militaire et savant est le dernier Le Gentil au Manoir. Il meurt à 70 ans dans la demeure qu'il a agrandie par de grands travaux, il est aussi "propriétaire de la presqu'île de Crozon" (1829), il ne s'est jamais marié, n'a aucune descendance. Des héritiers collatéraux, le capitaine de gendarmerie Joseph Kermel (l'ascendance Kermel provient de plusieurs unions entre les familles Folgar et Kermel entre autres), l'avocat Kersauzon-Penandref et Bertrand Melou de Trégain complètent leur aisance. .

1-Simon le Gentil est archer en brigandine pour Jehan de Cornouailles, sieur de Heguant, homme d’armes à trois chevaux pour la selle..
2-Yvon le Gentil, représenté par Guillaume le Bras, archer en brigandine. Petite noblesse de Plonevez-Porzay.
3-Henri-Anne de Névet (1676-1699), colonel du ban et de l’arrière-ban ; le 7 Juin 1694, commande la revue des troupes que Vauban passe à Quimper. Colonel du régiment de royal-vaisseaux Trévédy, sa santé déclinant, il renonça et se retira sur ses terres avec sa mère pour y mourir à quelques mois d’intervalle. Le Le Gentil cité est Tanguy Le Gentil (1627-1712).
4-Jean Tanguy Le Gentil est contraint de vendre des terres au roi en 1778. De nombreuses parcelles se situent sur les terrains de la nouvelle ligne de défense de Quélern. Futures fortifications de la presqu'île de Roscanvel entamées par Vauban bien auparavant. Le seigneur de Kelern n'est pas le seul propriétaire à faire face à cette dépossession mais compte tenu que les revenus fermiers sont la principale ressource du noble, le manque à gagner a dû ajouter de la précarité au couple. 4 sols la corde pour les terres profondes et 3 sols 6 deniers pour les terres de moindre intérêt. A la mort (1783) de Jean Tanguy, il laisse 27 000 livres de valeurs foncières. Son épouse est à hauteur de 18 000 francs (1795) et 620 francs de valeur mobilière à Landerneau. Ce capital est modeste pour une seigneurie.

Baron Emmanuel - Jean l'Evangéliste le Gentil de Quélern (1773-1843)

La "Biographie bretonne" (tome II - 1857) de Prosper Levot, conservateur de la bibliothèque du port de Brest, fait une brève biographie à propos d'Emmanuel - Marie - Jean l'Evangéliste le Gentil de Quélern. La date de naissance de l'illustre personnage est bien le 29 décembre 1773 et non 1775 comme écrit.

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Emmanuel - Jean l'Evangéliste le Gentil de Quélern était un savant, militaire, collectionneur, polyglotte, aux opinions politiques complexes dans une période complexe. A la fin de sa vie, il vit autant au "Clos Neuf" en Lambézellec qu'au manoir de Quélern. A sa mort, il laisse 260 000 francs de valeurs foncières dont les terres de l'ancien comté de Crozon. 190 000 francs de valeurs immobilières, 76 000 francs de valeurs mobilières dont une bibliothèque estimée à 13 000 francs. Il avait des revenus de 8500 frs annuels pour une imposition de 450 frs annuelle.

Alors, personnage sympathique ou pas ? Une anecdote rappelle que l'homme fut adjoint au maire de Crozon en 1835 et qu'il fut aussi conseiller général du canton à deux reprises. A ce titre, le notable n'ignorait pas la difficulté des maires à trouver des bâtiments pour les mairies et les écoles tant les finances des municipalités étaient maigrelettes. Le maire de Landévennec a des vues sur une maison en ruines, propriété de Le Gentil, pour y installer sa mairie, une école, un auditoire de justice. L'élu envoie un courrier au préfet du Finistère le 28 mai 1839 : "Mr Le Gentil est piqué de n'avoir point été nommé président du comice de Crozon. Il a une soif excessive des honneurs et trouve qu'on ne l'écoute pas assez à Crozon... Ses compatriotes trouvent qu'il ne fait pas assez pour le pays, aussi ne serait-il probablement point réélu s'il ne vend point sa maison. Ce serait d'autant plus fâcheux que c'est un homme de mérite qui peut être fort utile au pays."

La municipalité de Brest voulut acquérir la bibliothèque pour augmenter le fond de la bibliothèque municipale par les fameux 2900 livres du baron pour une somme de 15000 frs. Les héritiers n'ont pas donné suite.

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