Un toit aux allures industrieuses en pleine campagne, qu'est-ce donc se demande le promeneur attentif ? L'abattoir de Camaret a recouvré une nouvelle vocation de gîte de vacances dans un joli cadre de verdure proche de la plage du Veryac'h – Site géologique classé – et de la Pointe de Pen-Hir.
La municipalité de Camaret est en tractation dès 1935 avec
Mr Auffret propriétaire d'une parcelle en bord de mer qui ferait bien
l'affaire. Le propriétaire n'y tient pas et propose deux autres parcelles
au choix plus en retrait. Le maire Mr Louis-Auguste
Téphany, instigateur du projet, convoque un sourcier afin de trouver
un flux d'eau douce suffisant sur les parcelles évoquées. Le vétérinaire
départemantal est aussi invité à émettre un avis.
L'abattoir de Camaret-sur-Mer est inauguré le 31 juillet 1938. A droite
de l'entrée, la maison du gardien qui perçoit les taxes inhérentes à l'abattage.
A gauche de l'entrée, le bâtiment est une étable où stationnent les bêtes
en attente de la mort. Le bâtiment principal, avec son toit en béton cintré,
constitue le hall d'abattage équipé d'un équipement mécanique de marque
Diemer afin de limiter les efforts physiques lors des accrochages et déplacements
des carcasses. Une pièce est prévue pour l'abattage des porcs avec une
cuve à échauder ; une autre pièce stocke les peaux, elle est équipée d'un
incinérateur avec autoclave pour brûler les déchets. L'alimentation en
eau se fait par une pompe électrique dans un puits, celle-ci alimente
une réserve sous toit en hauteur pour obtenir une pression maximale pour
le lavage des équipements. Les eaux usées sont récupérées dans une fosse
d'épuration.
Conception : Omnium d'études techniques de Paris. Plans : Tillier, Albert
Combarrieu et Lahorre - ingénieurs.
Architecte consultant : Le Roux.
Réalisation : Union des services publics, sous l'égide de Mr. Jacques
Luchaire administrateur délégué.
Maître d'œuvre : société Laborderie frères et Minaud.
Entrepreneur : Joncour de Quimper.
Un bœuf de 381kg, pesé sur place, ouvrit l'activité devant un public
de notables et des Camarétois. La viande fut distribuée dès le lendemain
aux villageois.
La presse décrit :
" A 9 h. 30, MM. Tephany, maire ; Morvan, premier adjoint ; Le Meil
et Palud, adjoints, et les conseillers municipaux recevaient à la mairie
leurs invités, parmi lesquels on remarquait M. Filuzeau, sous-préfet de
Châteaulin, représentant M. Angeli, préfet du Finistère; MM. les sénateurs
Lancien, président du conseil général; Le Gorgeu, maire de Brest, ancien
ministre; Guillemot ; M. Crouan, député; MM. Porte, administrateur du
quartier de Camaret; Keranguyader, maire de Crozon; Jamault, maire de
Lanvéoc ; le docteur Rokozinski; Merle, directeur des services vétérinaires;
Le Roux, architecte; Tillier et Combarieu, de l'Omnium d'études techniques;
Minaud, de la société Laborderie frères ; le maître Saint-Pol- Roux, l'artiste
peintre Lucas et une grande partie de la population camarétoise."
Le peintre fait don d'un tableau à la commune.
Le cortège quitte la mairie en voiture pour l'abattoir de Kermeur
puis revient festoyer à Camaret à la suite de l'inauguration de l'abattoir
décoré de pavillons festifs pour l'occasion.
Extrait du discours du poète Saint Pol Roux énoncé lors du banquet offert
par les entreprises à la salle
de Venise à partir de 13 heures :
... "Et maintenant, vous les nécessaires sacrificateurs de ce monument
où la force animale va se mettre au service de la faiblesse humaine, amis
Quentric, Férec. Le Hir. Duffic. Hascoet, bouchers de Camaret. qui fermerez
la porte suprême sur le bœuf gras des jours de liesse, le mouton des prés
salés ou non. le cabri fragile des pâques fleuries, soyez doux à ces hôtes
d'une heure bêlant et meuglant après le tiède calme de l'étable et l'herbe
tendre des prairies, soyez doux jusqu'à l'éclair fatal du sacrifice rouge;
amis bouchers, soyez doux aux innocentes bêtes éperdues, dont 1e sombre
destin est de mourir pour nous faire vivre, nous les hommes"...
12 août 1938.
ARRÊTÉ MUNICIPAL. — Le maire de Camaret-sur-Mer considérant qu'il rentre
dans les attributions de l'autorité municipale de prescrire les mesures
de salubrité et de sécurité publiques qu'exige le libre exercice de la
profession de boucher ou de charcutier,
Arrête :
Article 1er. — L'abattage des bœufs, vaches, veaux, moutons et porcs
aura lieu exclusivement dans l'abattoir public situé à Kermeur.
Toutes les tueries particulières, triperies, etc., sont formellement interdites
sur le territoire de la commune.
Toutefois, les propriétaires et les habitants qui élèvent des porcs pour
la consommation de leur maison conservent la facilité de les abattre chez
eux, pourvu que ce soit dans un lieu clos et séparé de la voie publique.
Art. 2. — Les bouchers et charcutiers se pouvoiront des seaux, baquets,
brouettes et de tous les instruments et ustensiles nécessaires à leurs
travaux, et les entretiendront en bon état de service et de propreté.
Art. 3. — Il est défendu d'entrer, la nuit, dans l'abattoir autrement
qu'avec des lanternes fermées.
Art. 4. — Les bouchers et charcutiers seront tenus de nettoyer et de laver
chaque jour les emplacements d'abattage et les appareils employés, et
de tenir constamment en état de propreté les vêtements de travail et les
divers ustensiles de service.
Art. 5. — Il est expressément défendu de laisser ouvertes les portes pendant
l'abattage des bœufs et vaches.
Art. 6. — Les bouchers et charcutiers pourront pratiquer l'abattage à
toute heure de jour, mais ils ne pourront le faire pendant la nuit sans
une autorisation de l'autorité municipale.
Art. 7. — Les bœufs, vaches ou taureaux, avant d'être abbatus, devront
être fortement attachés à l'anneau scellé à cet effet dans l'abattoir.
Art. 8. — Les bœufs et taureaux ne pourront être conduits à l'abattoir
qu'avec des entraves ou accouplés.
Art. 9. — Les animaux seront visités avant l'abattage par le vétérinaire-inspecteur
ou par le préposé suppléant, le vétérinaire-inspecteur. Ceux reconnus
malsains seront exclus de l'abattoir et, s'il y a lieu, abattus d'urgence
conformément aux dispositions de la loi du 21 Juin 1898 et du décret du
6 octobre 1904, sur la police sanitaire des animaux.
Art. 10. — Après l'abattage, les viandes seront marquées d'une estampille,
portant en suscription le nom de la commune et la mention « inspection
vétérinaire », ainsi que tout autre signe particulier ou dlstinctif jugé
utile par l'autorité municipale sur la demande du vétérinaire-inspecteur.
Art. 11. — Les organes ou viandes reconnus impropres à la consommation
seront saisis et dénaturés de manière à les rendre inconsommables.
Lorsque la décision du vétérinaire-lnspecteur ou de son suppléant sera
contestée par le propriétaire ou le vétérinaire appelé par lui, le vétérinaire
départemental sera appelé en qualité d'arbitre pour décider en dernier
ressort, si l'intéressé y consent. Dans le cas contraire, les règles du
droit commun seront applicables. Les frais d'arbitrage seront à la charge
de celle des parties qui succombera.
Art. 12. — Toute saisie effectuée sera consignée sur un registre spécial,
avec la date d'abattage, le signalement de l'animal, le nom du propriétaire,
les noms, prénoms et domicile du vendeur, le motif de la saisie, la désignation
des parties saisies, leur poids, leur valeur et tous renseignements nécesaires
pour l'établissement au besoin des procès-verbaux de saisie de viande
pour cause de tuberculose.
Art. 13. — Lorqu'une maladie contagieuse, qu'elle motive ou non une saisie,
sera constatée par le vétérinaire-inspecteur, déclaration en sera immédiatement
faite aux autorités intéressées, dans les formes et délais prescrits par
la loi du 21 juin 1989 (art. 31) et le décret du 6 octobre 1904 (art.
1 à 101). Cette déclaration indiquera la nature de la maladie, la provenance
de l'animal, le nom et le domicile du vendeur.
Art. 14. — Les viandes, les abats et issues reconnus propres à la consommation
devront être enlevés au plus tard le lendemain du jour suivant celui de
l'abattage, à l'heure de la fermeture de l'abattoir.
Art. 15. — Il est enjoint aux bouchers et charcutiers de mettre le soin
et la propreté convenables dans les transport des viandes de l'abattoir
à leurs ateliers; ils devront les transporter enveloppées en évitant de
répandre du sang sur la voie publique.
°°°
Article 1er. — Fixe ainsi qu'il suit les tarifs d'abattage, des droits
d'abris, de triperie et des redevances à exiger des bouchers et charcutiers
pour usage des locaux particuliers et des installations spéciales mis
leur disposition :
Taxe d'abattage. — Poids vif : 0 fr. 10 par kilo; poids net : 0 fr. 20
par kilo; viandes foraines : 0 fr. 20 par kilo.
Triperie. — Il sera perçu une taxe de 5 fr. par porc.
Taxe de stabulation. — Il sera perçu un droit de stabulation au delà de
24 heures : par bœuf, taureau, vache, 3 fr. par jour; veau, mouton,,
porc, etc., 1 franc par jour.
Art. 2. — Le préposé au gardiennage de l'abattoir sera chargé de l'application
des dites taxes et redevances contenues dans le présent arrêté.
Avant la construction de l'abattoir, il y avait trois tueries
à Camaret. Des pièces malcommodes donnant sur des cours intérieures. Le
sang coulait à flot, on jetait un seau d'eau quand on avait de l'eau à
disposition. Il n'y avait pas d'eau courante, il fallait s'approvisionner
par corvée d'eau au point le plus proche. Les conditions d'abattage et
d'hygiène étaient épouvantables, ce qui invita le maire à se préoccuper
de ce problème d'hygiène publique. Auguste Tephany, de l'Union de la république
démocratique, dut faire appel aux pouvoirs politiques régionaux pour obtenir
les autorisations et les financements du projet dont la construction dura
18 mois, ce qui s'avère, pour l'époque, être un temps record grâce à l'introduction
du béton et de ses performances de coffrage dont le toit en voûte de la
hall d'abattage. On retrouve ces cintres dans les constructions militaires
de la fin du 19ème siècle et lors de la construction de la base de Lanvéoc
Poulmic avec ses hangars "papillon" contemporains de l'abattoir.
Un abattoir sous étroite surveillance de l'armée d'occupation allemande.
Toute la pression tombait sur les épaules du maire Tephany et des gardiens
des lieux : Sénéchal. Les bouchers de Camaret, en début de conflit, allaient
battre les campagnes pour chercher une bête ou deux. Avec l'instauration
des bons de viande, de tels agissements étaient risqués. Des bons alimentaires
toujours plus restrictifs pour la population. Les Allemands, d'un prime
abord régulier en 1940 et 1941 en payant leur consommation, ont commencé
à réquisitionner directement dans les fermes avec une arme bien en vue
et aucune rétribution en dédommagement. Ils ont développé de menus élevages
directement dans les grandes batteries de canons... Des soldats et des
administratifs locaux, comptaient régulièrement les animaux de ferme jusqu'aux
poules et poussins pour limiter le marché noir et prélever selon les besoins
sans s'inquiéter de la faim de la population.
48° 16' 1.7" N
4° 36' 28.1" O
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