Le dimanche 3 septembre 1944 en trois vagues successives
soit à 9h36, 10h16, 10h18, un ensemble de 393 bombardiers B 17 et leur
escorte de chasseurs P38 et P51 de la 3ème BD de la 8ème Air-Force a lâché
1037 tonnes de bombes sur Telgruc-sur-Mer occupé par l'armée allemande
jusqu'au 30 août avant le repli sur Crozon. Détails de la mission
n°601 du bombardement US de la presqu'île de Crozon.
Des FFI/FTP (résistants Français du colonel Eon) et des soldats Américains
du 17ème escadron de cavalerie (blindés du Général Earnest) ont pris position
dans la commune en attendant des renforts pour poursuivre la libération
et ceci depuis le 1er septembre. Suite à des accords d'évacuation germano-américains
du 21 août, les Telgruciens ont été invités à quitter leurs maisons pour
se réfugier à Châteaulin. Certaines familles ont peur de quitter leur
domicile pour éviter les pillages. D'autres estiment que puisque la commune
est libérée, il n'y a plus de danger.
108 morts officielles se répartissent en tant que civils, résistants français
– FFI/FTP, militaires américains. Dans la réalité, les victimes ne sont
pas forcément toutes connues. Côté américain, les autorités ont utilisé
des housses mortuaires provisoires et emportés une cinquantaine ou une
soixantaine de corps selon les sources sans la moindre confirmation, black-out
total de l'administration US. La seule donnée publique est la nomination
du groupe auquel était rattaché ces Américains, le 17th Cavalry Reconnaissance
Squadron, Mechanized, attaché au 15th Cavalry Group (Mech). Certaines
sources précisent qu'il s'agissait de deux platoon, 9th et 35th Engineers.
L'armée américaine pratique le bombardement stratégique en toute connaissance
de cause, de celui qui est peu efficace quant à la destruction des positions
ennemies de par son imprécision mais constitue une dissuasion redoutable
envers les troupes en déroute qui renoncent à se mêler à la population
civile. L'effet bouclier humain tombe de fait ce qui évite l'enlisement
de la confrontation. Partout en France lors de la seconde guerre mondiale,
et aujourd'hui encore, cette méthode désastreuse pour les vies humaines
est employée par les armées dominantes. Cette pratique bien qu'inavouable
en public est parfaitement assumée par les stratèges.
La hantise d'une guerre de guérilla et de harcèlement sporadique conduit
à de telles dispositions. Perdre un char lors d'un accrochage provoque
un amenuisement de la force d'attaque qu'il va être difficile de compenser
dans un délai bref. Cette hypothèse de combats ultimes de l'armée d'occupation
n'est pas sans fondement, les soldats Allemands ont peur de se rendre.
La rumeur court que les Américains fusillent leurs ennemis.
L'US Air Force prépare ses missions longtemps à l'avance car l'évaluation
des moyens techniques mis en œuvre fait l'objet d'une expertise de faisabilité
selon les renseignements de terrain récoltés. La mise à jour des informations
est toujours perfectible.
Le capitaine Christopher Blathwayt chef d'une équipe Jedburgh des services
secrets britanniques (SAS) du Team Gilbert dont la mission est d'assurer
la liaison entre les forces américaines et les résistants affirme dans
un rapport de fin de mission que le bombardement initial était prévu pour
le 1er septembre et non le 3.
Telgruc-sur-Mer est une station radar « réputée » qu'il faut anéantir,
la batterie du Menez Caon pareillement. Mais ce n'est pas seulement Telgruc
qui est visé, ce sont aussi Morgat, les batteries de Trémaïdic, Pen ar
Menez, le pont de Kerret... La terreur va y faire aussi d'autres victimes...
Le pilonnage de la presqu'île de Crozon est infernal et constitue le reflet
de l'importante défense allemande défendant Brest. Les pertes civiles
et américaines sont « anecdotiques » dans l'esprit militaire quelle que
soit l'horreur qu'elles inspirent. De très nombreux soldats américains
sont morts par des erreurs d'appréciation du commandement souvent dues
à une communication insuffisante entre les services. D'ailleurs, la campagne
de Normandie débute par un carnage provoqué par les Américains, sur des
Américains, dont un général Américain en fut l'une des victimes, le seul
général US mort au combat lors de la campagne de France... Le président
des Etats Unis d'alors envisage de suspendre les bombardements stratégiques.
L'Etat Major US l'en dissuade.
L'affaire de Telgruc est un dossier sombre parmi d'autres dossiers regrettables.
Au Sud de la Bretagne, d'autres erreurs vont être commises sans qu'aucune
vérité ne soit permise... Plus simplement, ce sont plus de 2000 civils
qui sont morts dans le Finistère lors de la libération sous les bombes
ou obus américains dans des zones prétendument évacuées ou sous contrôle
d'une Task force.
Rapport de la mission n°601 du 3 septembre 1944 :
1. BREST (Primary)
GUN BATTERIES
16 gun batteries and positions are attacked in the Brest, France area.
All of 3rd
Bomb Division was made up of now flying B-17s. 3rd Bomb Division was
made up of B-17s is 94th BG, 95th Bomb Group, 96th Bomb Group, 100th BG,
385th BG, 388th BG, 390th BG, 452nd BG, 486th BG, 487th BG, 490th BG,
493rd BG.
Mission Statistics
Tonnage dropped 1037.9 T
Une Task force américaine, un regroupement d'unités
composites provenant de différents régiments, constitue l'avant-garde
américaine qui vient de libérer le Menez-Hom de sa garnison allemande
avec la vive intervention de la résistance. Une avancée significative
qui nécessite cependant une attente raisonnable sur place. Brest connaît
encore des combats, la presqu'île de Plougastel n'est pas pleinement libérée.
L'intendance américaine n'est pas en ordre de marche. Les munitions et
les carburants sont susceptibles de manquer d'autant que les positions
allemandes de la presqu'île de Crozon sont tenues par des batteries lourdes
en service.
La résistance française trépigne et veut avancer au plus vite avant le
regroupement allemand prévisible. Les Américains refusent dans un premier
temps. Un compromis est trouvé entre le général Middleton (supérieur
d'Earnest) et le colonel Eon. Les résistants sont autorisés à avancer
aidés par l'armée américaine qui le soir venu recule et laisse les Français
à peine armé en avant. Après la catastrophe de Telgruc, le général Earnest
prend la direction des opérations et affecte la résistance à des missions
secondaires.
Dans le rapport de fin de mission de la Task Force "A",
il est mentionné une demande d'annulation de la mission de bombardement
du 3 septembre 1944. Le rapport est rédigé courant octobre.
Extrait du rapport de mission validé par le Général Earnest :
Operations of Task Force "A"
In the Brittany Peninsula
1 August to 22 September 1944
déclassifié par le NARA – National Archives and Records Administration
– le 19/12/1998
Extrait :
"History
Of the
15th Cavalry Group Activité :
This task force was assembled near Coutances on 1 August under the cammand
of Brig. General Herbert L. Earnest and consisted of the following units:
Headquarters, 1st. Tank Destroyer Brigade
Headquarters, 15th. Cavalry Group
Headquarters, 6th. Tank Destroyer Group
15th. Cavalry Squadron
17th. Cavalry Squadron
705th. Tank Destroyer Battalion
159th. Engineer Battalion (C)
509th. Engineer (L.P.) Company
Une bombe fumigène de marquage de cible tombe par erreur et déclenche les bombardements sur le Menez Luz alors PC du 17ème de reconnaissance et la poursuite des bombardements et mitraillages sur le village. Durant les évacuations sanitaires américaines (capitaine Parker) et françaises (infirmiers FFI), une seconde vague de bombardements et de mitraillages fait des victimes parmi les soignants.
Le 7 septembre 1944, le colonel Eon écrit au Lieutenant-General
Troy H. Middleton commandant les forces américaines du siège de Brest
et de la presqu'île de Crozon, celui là même qui a demandé la mission
de bombardement à l'Air Force :
"Pendant les journées précédant cette attaque, mon deuxième bureau,
qui a toujours travaillé en étroite collaboration avec votre G2, a fourni
à ce dernier tous les renseignements se rapportant à l'existence d'une
position de résistance ennemie barant la partie la plus étroite de la
presqu'île de Crozon, entre l'anse du Poulmic et de la baie de Morgat,
en précisant l'emplacement de chacun de ces ouvrages actifs ennemis; la
position des éléments avancés F.F.I., la présence de toute la population
civile dans le village de Telgruc, l'établissement du P.C. du colonel
commandant les F.F.I. à Telgruc...
J'ai fait déployer sur le sommet 146, à partir de 10h un ensemble de jalonnement
réglemantaire placé en glacis face au soleil, sur l'axe d'approche des
bombardiers, ce qui ne m'a pas empêché d'essuyer, quelques minutes plus
tard, deux attaques massives de forteresses volantes exactement centrées
sur ces panneaux. Enfin une heure plus tard, alors qu'une longue file
d'ambulances américaines portant sur toutes leurs faces de grandes croix
rouges était embouiteillée à l'entrée de telgruc dont la rue centrale
avait disparu sous les décombres, une dernière formation est venue, à
basse altitude, déverser ses bombes...
Ayant personnellement suivi de bout en bout les phases successives des
attaques sur le village de Telgruc au cours de cette tragique matinée,
mes conclusions sont les suivantes quant à ces procédés d'attaque.
A - Efficacité terrifiante sur les unités à découvert et plus
encore sur les maisons d'habitation et les populations civiles qui y habitent...
B - Efficacité absolument nulle sur les ouvrages de fortication
même faiblement enterrés.
C - Absence totale d'intelligence tactique de la part des formations
américaines considérées. Il paraît en effet incompréhensible qu'après
la première attaque qui a été menée à basse altitude, les équipages n'aient
pas aperçu la floraison de panneaux de jalonnement.
Si ces civils n'ont pas d'uniforme, ils sont néanmoins vos soldats et
ont le droit d'attendre de vous une autre récompense que celle d'un massacre
général dont celui de Telgruc m'a donné, le 3 septembre, un douloureux
avant-goût. Les contingents allemands confortablement installés à l'abri
de vos bombardements aériens, applaudiront au massacre des patriotes qui
ont jusqu"à présent leur ennemi le plus redoutable en Bretagne."
Les troupes US bombardées ont tenté de prévenir les aviateurs par radio.
Ordre est donné aux aviateurs de ne pas y donner suite car il est arrivé
que des services allemands parviennent à duper des aviateurs qui renoncèrent
à leur mission pensant satisfaire un contre-ordre de leur hiérarchie.
A propos des marquages au sol, outre le fait d'un épais nuage de poussières
enveloppait la commune, ajouté éventuellement à des fumigènes, la présence
de ceux-ci ne prouvaient pas leur validité. Des cas de connaissances allemandes
des marquages alliés, même changés régulièrement, ont eu pour effet d'induire
en erreur les aviateurs américains dans d'autres zones d'intervention.
La suspicion est à son comble en cette période.
A titre indicatif le 17th Cavalry Reconnaissance Squadron
était commandé alors le Lieutenant-colonel Kenneth K. Lindquist. L'unité
se divisait en 3 troupes : Troop A (1 platoon – 1 section –
semble être la victime du bombardement), Troop B, Troop C commandée par
le Capitaine Morton Mc Donald Jones Jr qui finira sa carrière en tant
que général (1918-2010). Officier indéterminé le Capitaine Henderson.
Le 17th Cavalry Reconnaissance Squadron est subordonné au 15th Cavalry
Group, Mechanized commandé par le Colonel John B. Reybold jusqu'en août
1944 puis le Lieutenant-Colonel Robert J. Quinn.
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Destins de guerre
Guy Eder de la Fontenelle • Gardien de batterie • Electro-sémaphoriste • Sous -marin Germinal • Sous marins Naïade Q015 et Q124
19e RI & 118e RI • 2e RAC & 3e RAP • 13ème RIC • 87e RIT • Le 248 RI 208ème compagnie et 5ème Bataillon en 1940 • Manœuvres à Telgruc
La guerre 14-18 en presqu'île • L'arraisonnement du Nieuw Amsterdam • Dixmude • Tahure • La Fronde • Débarquement d'Athènes • 3 frères morts pendant la grande guerre • Remorqueur Atlas • Cuirassé Danton • Cuirassé Suffren • Le Bouclier Hermann von Boetticher • Pilote aviateur Gaston Beven • Croiseur Ernest Renan • Soldats inconnus
19 juin 1940 premier jour d'occupation allemande • Qui a construit le Mur de l'Atlantique de la presqu'île de Crozon ?
La bataille de l'Ailette le 5 et 6 juin 1940 • Cargo le Granville • Croiseur cuirassé Kléber et sous-marin allemand UC-61 • Le Pluton • Le Sfax • Cuirassé Bretagne • Commandant L'Herminier • La bataille navale de Casablanca
Camp de Watenstedt • Déporté politique et déporté résistant • Jean Ménez • Résistant 18 ans fusillé • Rafle de Crozon
25/26 août 1944 bombardement de Roscanvel • 3 septembre 1944 bombardement de Telgruc
Départ des marins pêcheurs résistants vers l'Angleterre • L'Emigrant sous protection allemande • Jacques Mansion • Yves Lagatu • Résistance à Camaret • Georges Robin de l'I A de Camaret • Réseau Vengeance • Bataillon de FTP - Franc-tireur-partisan • Plan Vert et plan Violet • Maquis de Spezet • Tante Yvonne • La Suzanne-Renée - Réseaux d'évasions des pilotes Américains et Anglais de la WW2 • La Soizic • Ordonnances Sperrle et Keitel • Criminels de guerre allemands • Crime de guerre • Derniers actes de résistance avant la Libération • Compagnon de la Libération • Marcel Clédic
Bateaux communistes • Rose Bruteller • Répartition des œufs • L'inflation • Accueil des familles juives
Les tombes du Commonwealth de : Camaret - Crozon - Lanvéoc - Roscanvel • Crashs des avions
Les forces américaines de la libération de Brest et Crozon • 3rd Division Air Force • Task force (A et B) • 2. Tactical Air Force RAF • Opération Rhubarb • Bateaux de Camaret arraisonnés ou mitraillés par la Royal Navy et la RAF • Les bancs de brouillard
Les forces allemandes lors de la libération de Brest et Crozon • Les légions étrangères allemandes présentes en Crozon • Feldkommandantur 752 • Poste avancé Toul ar Stang : Russes blancs • Camp de prisonniers de Rostellec
Charles de Gaulle • Mémorial de l'aéronautique • La Croix de Pen-Hir • Monument aux morts de Crozon • Monument aux morts de Landévennec • Morts pour la France • Officier mécanicien Capitaine Jean Tassa
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