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Répartition et distribution des œufs pendant la guerre

Affichage administratif dans les mairies, sur les panneaux réglementaires, dans la presse... AVIS AUX DETAILLANTS. Les détaillants qui ont recueilli des inscriptions d’œuf prévues pour l'agglomération brestoise, Le Relecq-Kerhuon, Camaret, Ouessant, Molène, sont priés de remettre les tickets n°148 des catégories E, Jl, J2, V, collés sur des états modèle II bis, dans la journée du mardi 15 décembre 1942 à Mme M..., 22 bis, rue Puébla, Lambézellec, désignée par le bureau départemental de répartition des œufs pour effectuer la distribution dans ces communes.

L'administration française sous l'occupation allemande est éminemment structurée. L'œuf est sujet de préoccupation. Sur le terrain, régulièrement des soldats Allemands comptent les poules et estiment la production d'œufs ferme par ferme. Si au début de la guerre, ils ont un comportement purement comptable, la dégradation des approvisionnements les rendront d'abord mercantile en échangeant leurs rations contre des œufs frais, puis ils deviendront menaçant voire voleurs. Les kommandanturs locales recueillent quelques plaintes d'habitants mécontents et somme toute courageux. Les soldats s'étant mal comportés sont arrêtés par la police militaire germanique – feldgendarmerie.

Les épiciers Français sont surpris de l'engouement des Allemands pour les œufs frais. Dans les premiers mois de l'occupation la ruée sur l'œuf frais à gober est démentiel. Un petit commerce parallèle s'instaure et les prix grimpent. L'inflation déstabilise les ménages déjà fragiles. Finalement, tous les français n'ont plus accès à une consommation d'œuf régulière. Dans la marée des décisions du gouvernement Vichyste dans le domaine de la gestion des réquisitions, on trouve trace de la création d'un bureau départemental de répartition des œufs décidant du nombre d’œufs à distribuer aux détaillants de chaque commune. Les contrôles de suivis se font par des fiches cartonnées modèles sur lesquelles l'utilisateur colle des vignettes appropriées qu'il aura eut soin de saliver au préalable.

Il va de soi que le marché noir connaît alors une recrudescence faste et il n'est pas rare que des habitants de la presqu'île de Crozon parcourent à pieds ou à vélo des kilomètres pour atteindre l'intérieur du Finistère et acheter à prix d'or des œufs et d'autres provisions pour survivre. Les autorités allemandes font preuve d'une certaine tolérance quand elles peuvent bénéficier de certains avantages directs mais inversement quand les exagérations de part et d'autre se savent, les sanctions pleuvent. Pour quelques œufs non enregistrés, on risque un jugement au tribunal de Quimper assorti d'une amende et plus fréquemment encore d'un emprisonnement de quelques semaines avec de surcroît un fichage, dans les kommandanturs, particulièrement embarrassant car de trafiquant du marché noir, on peut se retrouver suspecté de terrorisme en cas de simple dénonciation ou de comportement jugé anti-allemand. Une peine de mort est alors envisageable.