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L'Hermione dans le Goulet de Brest

La réplique de l'Hermione – frégate navigante depuis 2014 – emprunte la passe Nord du Goulet de Brest comme l'avait fait l'Hermione originelle il y a bien plus de deux siècles déjà. La réplique du vaisseau de guerre est une modernisation d'une construction navale du 18ème siècle. Les chevilles en bois sont remplacées par un boulonnage métallique et les mâts sont encollés et non plus cerclés au fer, deux fragilités de la grande époque des frégates, navires de guerre légers rompant avec les lourds vaisseaux de ligne peu maniables.

L'Hermione – nom de la mythologie grecque : fille de Ménélas et d'Hélène – de la Classe Concorde est un navire de série construit à Rochefort et mis en service en mai 1779. Commandant : le lieutenant de vaisseau Louis-René-Madeleine Levassor de Latouche dit La Touche-Tréville, futur amiral napoléonien. Durant la période d'essai dans le golfe de Gascogne, la frégate donne des résultats inespérés par des captures corsaires et des combats éclatants. Première venue à Brest le 18 septembre 1779 pour rejoindre la flotte franco-espagnole déconfite par une perspective de débarquement sur les côtes de l'Angleterre qui s'achève par une déroute complète des flottes française et espagnole.

Ensuite l'Hermione est en surveillance côtière durant des mois et fait relâche à Camaret le 12 février 1780. La frégate escorte des convois marchands dans les semaines qui suivent avant d'entrer dans l'histoire de la Marine parce qu'un noble de 20 ans missionné par le roi Louis XVI (16ème) de France l'envoie en messager secret vers les Amériques prévenir les insurgés (chef : général George Washington) qu'un corps expéditionnaire de 5000 hommes embarqués à Brest ne saurait tarder à venir combattre l'armée anglaise qui mène la colonie sous la contrainte surtout au niveau de l'imposition croissante, tout particulièrement celle du thé et pas seulement (naissance de l'expression tea party). Les immigrés blancs qui font fortunes n'apprécient guère les termes de cette oppression. Le roi français y voit une opportunité d'affaiblir l'Angleterre dominante en tout et gênante de même. Le jeune envoyé n'est autre que Gilbert de Motier, marquis de La Fayette, mousquetaire du roi, qui embarque pour la deuxième fois le 20 mars 1780 pour cette Amérique qui se dit indépendante depuis 1776. Le commandant de l'Hermione ignore le sens de la mission du jeune diplomate entouré de six domestiques et d'un secrétaire à bord d'un navire de guerre de 26 canons. La « tournée » américaine est glorieuse entre accords diplomatiques et batailles navales mémorables. Retour triomphal en France en février 1782. Brève halte à Brest pour débarquer Lafayette et un document écrit reprenant partiellement les termes de la déclaration d'indépendance des Etats-Unis qui servira plus tard à la rédaction de la déclaration des droits de l'homme et des citoyens. Lafayette tout auréolé à la cour de France instille un espoir de liberté d'égalité et de fraternité dans les esprits ouverts aux idées nouvelles qui couvent.

L'Hermione rejoint Rochefort le 25 février pour d'importantes réparations... et part vers les Indes en septembre...

De retour de mission, le navire est mal en point, la pourriture atteint la coque. L'immobilisation durant des années à Rochefort aggrave la situation.

L'Hermione reprend du service en 1793, commandée cette fois par le capitaine de vaisseau Pierre Martin qui finira sa carrière en tant que vice-amiral sans éclat. La frégate doit accompagner et protéger des navires marchands entre Brest et l'Espagne avant de participer à la surveillance de la Vendée et à la défense de Nantes. Au cours d'une manœuvre mal conduite par le pilote de port Guillaume Guillemin, l'Hermione, « fatiguée » talonne et coule sur le plateau du Four au large du Croisic le 20 septembre 1793. L'équipage est sauf.

L'Hermione fit partie du décor maritime de la presqu'île de Crozon mais sans doute dans un relatif anonymat car la flotte française composée de plusieurs dizaines de navires de guerre de tous tonnages est au mouillage dans la rade de Brest dans des alignements parfaits. Cette perfection sera rompue par la destruction de celle-ci à Trafalgar... La Rade sera vidée de ses célèbres voiles. L'image hanta les populations locales tant cela parut impensable.