Commémoration de la Libération de Roscanvel et de la presqu'île de Crozon dans son ensemble
19 septembre 1944  - Stèle de Kerguinou

La sonnerie aux morts, la Marseillaise, la chant des partisans, une minute de silence, un moment de recueillement

Dans chaque cérémonie de commémoration, il se passe quelque-chose de riche en symbole. Un jeune officier se présenta au résistant invité à cette commémoration du 19 septembre 1944 à la stèle de Kerguinou. Avant toute chose, le vieux combattant fit un salut militaire très naturel qui surprit l'officier d'active. Avec un léger retard, l'officier fit son salut militaire avec une pointe de gêne pour avoir manqué de tact. Simplicité, humilité, respect, cet ancien combattant était décidément très émouvant.

Pour la population de Crozon la guerre prend fin à quelques pas de la stèle. Enfoui, dans la végétation, un des nombreux magasins sous roc de Roscanvel a vu sortir d'un profond souterrain un certain Lieutenant Général Ramcke, le 19 septembre 1944. Le Lieutenant Général Ramcke commandait la place forte de Brest en 1944. La pression américaine s'accroît et par petites unités autour de Brest, les soldats Allemands se rendent. Ce général s'enfuit par bateau et se réfugie dans une soute à munitions française du 19ème siècle appartenant à l'une des batteries hautes du Fort des Capucins. Les troupes allemandes sur la Presqu'île de Crozon sont encore nombreuses, il espère résister. Il se trompe sur la réalité militaire du moment. Oui les Allemands sont nombreux, plus nombreux que les Américains qui semblent être venus en sous nombre. Cependant les soldats Allemands savent que des troupes d'élites se sont rendues à Brest. Ils savent que la Bretagne est libérée. La terre natale est devenue lointaine. Se battre revient à mourir, pour quoi faire ? La victoire n'est plus à leur portée. Même s'il y a eu quelques combats rugueux, partout les lignes allemandes de la presqu'île cèdent. En fin d’après midi du 19 septembre 1944, le général Ramcke se rend avec plus de 1500 de ses hommes positionnés sur les hauteurs du fort des Capucins. Ce sont les derniers combats de la presqu'île de Crozon, la guerre est enfin terminée...

Le peintre Américain Rick Reeves a représenté la scène de la reddition dans laquelle on voit des soldats Américains arrivant par l'escalier. La conversation devenue historique se serait produite dans la partie centrale, au pied de l'escalier. Par contre la représentation de la soute par le peintre fait penser à un bunker en béton, ce qui dans la réalité est faux. Le magasin est creusé sous roc, les parois sont en briques rouges crépies et peintes à la chaux façon ouvrage de marine de la fin du 19ème siècle. En l'absence de cloison, la  chaux est envoyée sur le crépis de la roche.
Peinture commandée pour la classe 2000 de l'U.S.Army War College in Pennsylvania.
L'imposant magasin refuge de Ramcke, lieu de la reddition allemande de la Presqu'île de Crozon, appartenait à la batterie française de 100mm du plateau.

Le 19 septembre 1944 vers 11 heures du matin, les troupes américaines arrivent à la porte de Quélern qui vient d'être pilonnée par l'artillerie américaine. Les parachutistes Allemands qui se trouvent côté fort de Quélern, commandés par Ernst Mehler, vont faire un semblant de résistance jusqu'à la fin de l'après-midi sans doute le temps que leur général ayant fuit Brest et se cachant dans une soute à munitions française un peu plus au Nord, prenne ses dispositions pour se rendre dignement. L'état-major allemand est en communication constante avec l'état major américain depuis l'encerclement de Brest. Des drapeaux blancs apparaissent peu à peu sur les positions de côte. Il est su que le General der Fallschirmtruppe Ramcke rompt le combat.

Le Brigadier Général Américain Charles D.W. Canham (adjoint du général Stroh) de la 8ème Division de l'armée américaine se met en avant afin de se présenter à la tanière du vaincu. Il faut descendre un long escalier cimenté sous une voûte colorée à la  chaux.

Le général Allemand entouré de quelques officiers et portant une serviette de documents aurait dit par le biais d'un interprète : "I am to surrender to you. Let me see your credentials." "J'accepte de me rendre à vous. Montrez-moi vos accréditations." Ultime trait d'orgueil, le Général Ramcke aurait préféré se rendre à des officiers supérieurs de son rang. Le Général Canham ulcéré réplique en désignant ses hommes (GI's) proches de lui "Voici mes accréditations !". "These are my credentials" devient la devise de la 8ème Division d'Infanterie.

Le lendemain au QG américain de Lesneven, Ramcke prendra la pause avec son chien devant des journalistes avec des petits sourires équivoques... Hitler venait de lui donner les plus hautes distinctions militaires pour sa résistance au siège de Brest (croix de chevalier de la croix de fer avec feuilles de chêne, glaives et brillants). Le général Ramcke sera prisonnier, un temps, au camp de Clinton , Mississippi USA, puis jugé et condamné en France en 1951 à 5 ans d'emprisonnement pour crimes de guerre et pour son adhésion au nazisme. Peine qu'il ne fera pas parce que le Général Américain Troy Houston Middleton, commandant le siège de Brest, a témoigné que le général Allemand avait évacué les Brestois avant que les combats ne deviennent trop sévères. Les deux hommes entretiendront une correspondance régulière jusqu'à la mort de Ramcke. Dans ses mémoires, le Général Ramcke fera tout pour minimiser ses opinions peu défendables.

Il ne mentionna pas ses mensonges lors des négociations germano-américaines pour que cesse le combat inutile de Brest. Cet officier avait déclaré des camps sanitaires alors qu'il s'agissait de dépôts de carburant connus de l'armée US. Il ne se vanta pas d'avoir beaucoup attendu une exfiltration promise par Hitler qui ne put se faire pour des raisons techniques - par deux fois les vedettes sont tombées en panne. Il omit de rappeler, après sa fuite de Brest par la Rade, son passage par le camp sanitaire du Fret qui selon les conventions de Genève, interdit toute présence même brève d'un soldat en situation de combat... Loin du héros, cet officier a fait durer le siège de Brest jusqu'au pourrissement absurde, jusqu'à provoquer le doute quant à ses motivations : esprit jusqu'au-boutiste du devoir ou convenances personnelles pour échapper à une arrestation déshonorante ?

Dans des notes publiées, le général Américain Stroh parle de l'offensive sur la Presqu'île de Crozon comme d'une campagne éclair de 5 jours. Il est vrai que le Général a été détaché des positions encerclant Brest où les combats furent longs et acharnés.
L'armée américaine aurait fait prisonniers sur la presqu'île, selon lui, 225 officiers Allemands dont deux Généraux (Ramcke et Rauch commandants la forteresse de Brest et s'étant enfuis par la mer pour se réfugier, l'un au fort des Capucins, l'autre au Cap de la Chèvre), 895 sous-officiers et 6316 hommes du rang. Il y aurait eu une centaine de morts Allemands. L'enthousiasme du Général aurait pu être tempéré en sachant qu'une grande proportion des victimes Américaines fut le fruit de bombardements américains hasardeux dont celui du 3septembre 1944 !



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