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La croix huguenote entre enfin dans les cimetières

Une croix huguenote visible sur une sépulture en presqu'île est l'occasion de retracer des siècles d'histoire de France pour expliquer une banalité si longtemps impensable.

Une croix pattée attribuée sans aucune certitude à l'orfèvre Maystre du 4 rue du Marché à Nîmes en 1688. Cet « artiste » pourrait avoir repris un modèle créé à Lyon quelque temps auparavant, d'après un modèle avec un « pilon » (une goutte) à la place de la colombe. Cette création qui serait donc postérieure à l'Edit de Nantes (1598) permettait aux protestants d'afficher leur appartenance religieuse ostensiblement. Cette croix qui par son apparence réfute volontairement toute ressemblance à la croix catholique, intrigue certains historiens qui se demandent si le choix de la similitude à la croix de l'ordre du Saint Esprit, ordre nobiliaire catholique créé par Henri III le 31 décembre 1578, n'était pas une façon de jouer la prudence malgré la liberté de culte octroyée par Henri IV par le biais de son fameux édit. Le sang avait tant coulé durant les guerres de religion, qu'une décision royale ne suffisait pas à éteindre les haines des uns envers les autres et réciproquement.
La colombe représente le Saint-Esprit descendant du ciel vers la terre.
Les huit pointes couvertes d'une boule représentent les huit béatitudes.
Les lys rappellent l'appartenance à la royauté.

La présence ancienne des protestants en presqu'île de Crozon n'est pas aisée à attester. La Presqu'île était une terre catholique aux mains de l'abbaye de Daoulas à l'extrême Ouest et de l'abbaye de Landévennec pour le reste, pour l'essentiel. Les éventuels protestants devaient sans doute transiter et en cas de décès, il valait mieux qu'ils n'aient pas de signes distinctifs pour espérer une sépulture dans un cimetière local.

La révocation de l'Edit de Nantes par Louis XIV en 1685, interdit le protestantisme et par voie de conséquence, l'inhumation des protestants dans les cimetières catholiques qui étaient des terres bénites.

Les flux des « protestaires » étaient essentiellement Anglais et secondairement de différentes nationalités des pays nordiques à cause des activités maritimes marchandes ou militaires, voire guerrières. Entre commerces, attaques, espionnages ou tout simplement mouillages, les protestants ne faisaient que passer !

Les débarquements manqués des Anglais de Trez Rouz (800 morts sur la plage), de Lam Saoz, etc, avaient laissé des cadavres que les autorités militaires et civiles avec le grand soulagement des religieux, avaient ensevelis dans des terres communes proches des lieux du drame. Certes, une telle quantité de cadavres étaient ingérables à transporter, mais pour les cadavres inconnus rejetés à la côte tout au long de l'année, la moindre suspicion de protestantisme interdisait l'accès à une sépulture décente. Chaque cadavre était minutieusement dépouillé pour chercher l'indice irréfutable. Une commission d'enquête était requise. Une tenue vestimentaire anglaise ou hollandaise suffisait à trancher. Le doute était à la défaveur du mort...

Les Anglais mettaient régulièrement leurs escadres devant Camaret ou dans la baie de Douarnenez, les milices garde-côtes étaient souvent en alerte. Les réquisitions de service altéraient le temps consacré à la pêche ou à l'agriculture, seuls moyens de survie. Ces affaires de protestants contre la bienveillante religion catholique exaspéraient les habitants tant qu'il n'y avait pas d'avantages financiers ou matériels à prendre soin de l'ennemi juré. Les Crozonnais ou Camarétois avaient l'habitude de faire feu contre l'Anglais et sa religion « dénaturée ». Version officielle largement orientée par les autorités du diocèse et les autorités royales, puis impériales. Le fameux antagonisme religieux des Bretons envers le protestantisme charriait bien des nuances en Presqu'île de Crozon.

En juillet 1813, par exemple, une péniche anglaise vint draguer entre la pointe du Kador et l'Île Vierge pour nourrir l'escadre au mouillage à proximité. L'embarcation chavira. Les naufragés, pour certains, se retrouvèrent entre les mains de douaniers Morgatois qui leur prêtèrent assistance tandis qu'à quelques dizaines de mètres, pour d'autres, les garde-côtes tirèrent sur des Anglais sans défense agrippés à des rochers. Huit corps britanniques furent retrouvés sur la plage de Postolonnec. Les Anglais épargnés furent choyés à Crozon et l'amiral Britannique Keith offrit vins et belles récompenses pour la récupération de ses hommes pendant qu'il donnait ordre de canonner Douarnenez en représailles. Après enquête, on s'aperçut que les Presqu'îliens avaient des tendances prononcées aux arrangements avec le mécréant protestant qui n'était pas plus ingrat que le pingre clergé toujours bon à demander l'aumône et le sacrifice permanent.

Depuis la bataille navale de Trafalgar (1805) et la perte de la flotte française, le coup économique était important. Brest et son fameux port vivait au ralenti en l'absence de marine. Après Waterloo (1815), et la fin du rayonnement napoléonien, les Presqu'îliens vivaient une perception du monde pleine d'incertitudes. Leur pauvreté était toujours la même, l'Eglise ne parvenait pas à ordonner suffisamment de prêtres, les chapelles se fermaient ou se trouvaient en ruines pour beaucoup. Un parfum de confrontation entre l'Eglise et la classe politique diminuait les convictions. Rien n'avait changé mais rien n'était plus comme avant.

La seule communauté protestante réputée était celle de Brest, et encore... L'Edit de Nantes n'avait pas suffit en Bretagne occidentale pour offrir la liberté de culte aux Bretons. Les mentalités étaient soumises à l'église catholique dans la crainte de l'Ankou (mort) et du diable. La véritable assise protestante émergea au début du 19ème siècle au cœur d'un courant anticlérical acharné qui mena Brest dans les années 1820 à l'émeute sanglante. L'état s'en était mêlé, l'armée sous la forme d'une garnison de soldats royaux suisses avait du intervenir.

En sous-main, Anthony Perrier, consul du Royaume-Uni à Brest, soutint la communauté protestante plutôt argentée par le commerce ou influente par des postes administratifs élevés. Quelques officiers de marine britanniques avaient aussi épousé des Brestoises de bonnes conditions. Pour les Anglais, une ville protestante en tant que port stratégique français était une aubaine géopolitique qu'il ne fallait pas manquer.

Une partie de cette communauté avait immigré du canton suisse des Grisons.

Ce soutien providentiel tenta d'obtenir un lieu de culte. Le maire Joseph Marie de Kerros, anticlérical exacerbé, reçut un émissaire du consul, le pasteur Achille le Fourdrey, le 21 avril 1832, avec le sourire. L'édile proposa au représentant de l'église réformée un local et un salaire prélevé sur le budget municipal. Etant réfractaire au miracle, le pasteur n'en crut pas ses oreilles et soupçonna un calcul politicien... Et pour cause, la communauté protestante, à vivre repliée et dans l'entraide permanente, était devenue riche et puissante, donc indispensable à la politique locale.

Quoiqu'il en soit progressivement, être protestant à Brest fut acceptable et parfois souhaité pour certains intérêts. Partant de là, et au vue de l'affaiblissement de l'église en presqu'île, avec de surcroît les lois de la laïcité du début du 20ème siècle, quelques familles protestantes purent rayonner dont la plus connue est la famille Chabal, architecte de père en fils à l'origine des plans de nombreuses villas de Morgat. Des ouvriers bien choisis avaient suivi, quelques familles s'installèrent en toute discrétion.

Ainsi, l'apparition d'une croix huguenote dans un cimetière au milieu des croix catholiques est devenu chose possible après des siècles d'interdiction.

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