Chaque mur du Fret se souvient des pêcheurs de coquilles.
Les viviers à coquilles étaient sous les eaux à marée haute.
Vestiges des viviers sur la grève. Ceux-ci sont remplis de sable mais on devine un béton armé sommaire pour limite des parcs.
La pêche des coquillages dans la Rade de Brest est une
sorte de circonstance inattendue dont l'origine est liée à la mise en
service du canal Brest-Nantes. Ce canal qui permet de contourner le blocus
anglais du port stratégique de guerre brestois ouvre aussi de nouveaux
horizons à l'agriculture dans l'arrière pays. Plusieurs familles nobles
et propriétaires terriennes interviennent pour que l'agriculture se modernise
et incitent les paysans à y participer. Ce sont les organisateurs des
foires et ont des facilités pour exporter les productions. Parmi les éléments
de modernité les amendements sont une priorité.
Des embarcations sont dédiées par des patrons pêcheurs à la collecte de
sable et de maërl dans les fonds de la Rade de Brest. Les sabliers remontent
alors des coquillages en abondance. Jusqu'ici les pêcheurs favorisaient
les poissons gras qui tenaient plus au corps dans leur alimentation mais
les coquillages sont très vite prisés par les familles aisées qui y trouvent
des saveurs nouvelles. Ces pêches se sont intensifiées jusqu'à la seconde
guerre mondiale. Le seul port
du Fret avait 145 coquillers en 1939. Environ 800 marins pêcheurs
sont inscrits aux embarquements. Une pêche néanmoins harassante et dangereuse
tant les dragues risquent de faire chavirer les frêles embarcations, pire,
une drague accrochée au fond, le bateau coule et l'équipage avec car peu
de marins savent nager, ajoutez à cela les collisions entre coquillers...
Ce sont des centaines de tonnes à l'année de coquilles Saint Jacques,,
de pétoncles, praires et palourdes qui sont débarquées au port du Fret
dans des sacs emportés par des mareyeurs de Camaret en charrette. Les
invendus sont entreposés dans des locaux de stockage en attendant preneurs
ou sont placés dans des viviers sur la grève du Fret, côté Ile Longue.
Quand le train vient enfin au Fret, des expéditions par wagons frigorifiques
permettent d'écouler encore plus de marchandises.
A la fin de la journée, les pêcheurs fourbus font un choix, soit de rentrer
chez eux en sabots de bois dans les chemins creux, dans le vent et la
pluie, pour un grand nombre jusqu'à Camaret, une sacrée trotte; soit de
rester loger chez l'habitant au Fret pour repartir à la pêche le lendemain.
Ceux qui choisissent de rester sur place logent dans des greniers, des
remises, des étables ou dans les combles des magasins de stockage... Au
repas du soir, des coquilles poêlées, de la soupe du pain et du vin et
si possible une bonne fête dansante dans les lieux de location dont l'espace
le permet. Cette ambiance là était une joie du cœur pour tout le
monde malgré la dureté quotidienne.
Dans les années 1950, la ressource devient plus rare et l'ensemble de
la pêche traditionnelle ne peut rivaliser avec des chalutiers toujours
plus grands, plus mécanisés. Le métier de pêcheur n'attire plus autant,
chacun reste dans son port et le tintamarre de la saison des coquilles
se tait définitivement.
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