Le chemin rural ci-dessus correspond à un chemin royal ou chemin de traverse (largeur identique jusqu'en 1720 – le royal accueille les postes et services officiels, meilleur carrossage) de qualité au 18ème siècle, une voie idéale, empierrée, presque rectiligne, ayant peu de déclivité. La voie civile la plus large à la disposition des presqu'îliens d'antan durant des siècles et dont l'entretien leur incombait de force !
Le chemin rural, principale voie de communication en presqu'île. Plusieurs centaines de kilomètres en réseaux. Pour quelques travailleurs employés, le chemin de l'embauche de plusieurs kilomètres chaque jour, en sabots de bois. Suffisamment large pour une charrette de goémon ou de céréales. Entretenu après chaque hiver sur ordre du seigneur propriétaire.
Le chemin d'habitude et de servitude qui se perd dans une nature sans fougères, sans arbres, ni ajoncs à l'époque. Entretien par le passage des humains et de quelques bestiaux – une vache pour dix moutons environ. Souvent impraticable en hiver, envahi par l'herbe au printemps. Chemin connu des habitants locaux at qu'aucun noble ne vient visiter tant cela est dégradant pour son rang et les sabots de son cheval.
Le chemin des douaniers, aujourd'hui chemin de grande randonnée n°34 (GR 34) élargi par la fréquentation touristique. Il entoure la presqu'île et rejoint chaque poste côtier des douanes.
A partir du 18ème siècle, la gestion de l'entretien du
réseau routier est organisé au niveau du royaume et non plus simplement
au niveau de la seigneurie... Quoique !
Le seigneur impose des corvées d'entretien de l'ensemble de ses terres
aux paysans qui vivent sur son fief. Travail redouté auprès des serfs
qui en connaissent la dureté et la récurrence surtout dans un pays aussi
humide que la presqu'île de Crozon. Les ruissellements, les boues sont
d'une nature à saccager les chemins. Les curés
se plaignent de cette malédiction en cette Arabie
Pétrée gluante.
A partir de 1713, un inspecteur général des ponts et chaussées est désigné
à la tête d'une élection (entité financière équivalente à une région –
soit un « pays d'état » selon la formule consacrée à la Bretagne indépendante
dans sa gestion routière) secondé par des ingénieurs au nombre de deux
par généralité (entité similaire au département). L'organisation est surtout
basée sur une absence de fonds royaux de sorte que les pauvres sont corvéables
à merci et judiciairement poursuivis en cas de défaut de présence. Une
justice qui châtie par la violence.
Les nobles, les religieux, les citadins ainsi que les fonctionnaires sont
exclus de la corvée. La corvée (corvée royale 1738-1787) impose le développement
routier des voies royales en sus des entretiens locaux tous deux assumés
par les paysans /ruraux. L'usage des routes royales leur est parfaitement
inutile. La notion de voyage est inconnue alors en dehors des embarquements
pour les marins.
A partir de 1787, une contribution par paroisse est perçue par le receveur
général local qui provisionne les entrepreneurs pour les chantiers. Le
principe existe mais reste balbutiant et méconnu dans les provinces reculées.
A la Révolution (1789), les paysans font savoir par les cahiers de doléance
qu'ils veulent mettre un terme à leur devoir d'entretien des routes et
des chemins qu'ils jugent injuste d'autant que ce travail s'ajoute à leurs
activités agricoles déjà bien pénibles et peu lucratives. La période révolutionnaire
débouche sur un abandon des voies de communication qu'il faudra reprendre
progressivement au 19ème siècle.
En presqu'île de Crozon, il existe deux réseaux « routiers », il faudrait
plutôt parler de deux types de voies de cheminement.
• La version « luxueuse » de l'armée qui a son propre réseau de
chemins
militaires parfaitement empierré pour déplacer les canons toujours
plus gigantesques de plusieurs tonnes, les munitions qui les accompagnent,
le matériel, l'intendance des batteries de côte et la troupe elle-même
vers des cantonnements bien desservis. Les vestiges de ces voies, pour
beaucoup du 19ème siècle, sont significatifs dans la presqu'île de Roscanvel.
• La version « démunie » civile qui pêche par son manque d'entretien,
de stabilité, de carrossage, et qui ne satisfait personne jamais.
L'arrêt du 3 mai 1720 fait une classification des voies avec leurs largeurs
de référence (grande route 60 pieds, route 60 pieds, grand chemin 48 pieds,
chemin royal 36 pieds, chemin de traverse 30 pieds) rarement appliquées
surtout dans les contrées sans ressources économiques et donc sans échanges
commerciaux majeurs ce qui est le cas de la presqu'île de Crozon. Mieux
vaut diviser par deux, voire deux et demi, les normes pour joindre la
réalité du terrain en ce qui concerne les chemins royaux et de traverse
en presqu'île. Les quelques transports se font par voies maritimes. Sinon
les presqu'îliens, pour ceux qui le peuvent, empruntent les grèves et
leurs passages
de goémoniers pour se déplacer et éviter les boues des chemins
creux. Quant aux chemins ruraux, ils reprennent parfois les anciennes
voies romaines dans
leurs meilleures configurations. Il est préférable de reprendre un ancien
tracé empierré que d'en creuser un nouveau sachant que le carrossage est
difficile. La fourniture de pierres adaptées est d'un coût prohibitif
parce que la méthode de concassage est manuelle et que les animaux d'attelage,
bœufs ou chevaux, sont rares.
L'arrêt du 6 février 1776 liste les routes par classe... Route de 1ère
classe, 2ème classe, 3ème classe, 4ème classe. La presqu'île de Crozon
recense quelques routes de 3ème classe équivalentes aux départementales
mais bien plus étroites – deux diligences en croisement ; ainsi qu'essentiellement
des voies de 4ème classe équivalentes aux routes communales – une charrette
et un piéton mais pas de véhicule de service.
A la fin du 19ème siècle et au début du 20ème siècle, à la venue de l'automobile,
les accidents sont quotidiens. Les routes sont insuffisamment larges pour
une voiture et un piéton, et d'autant plus pour une voiture et un cycliste.
La presse relaye des blessés et des morts qui sont bousculés vers les
fossés plus ou moins profonds. Le médecin de campagne arrive sur place
tant bien que mal, souvent trop tard. L'hécatombe s'atténuera à l'approche
de la seconde guerre mondiale avec cependant une augmentation sensible
des excès de vitesse et une hausse des accidents mortels impliquant cette
fois les automobilistes eux-mêmes.
Aujourd'hui, l’entretien des voies incombe à leurs
propriétaires.
Classification des voies de communication routière :
Autoroute en concession privée : entretien à la charge de la société privée
exploitante pour une durée déterminée, ceci sous la surveillance de la
Direction Générale des Infrastructures, des Transports et de la Mer (DGITM).
Autoroute d'Etat hors concession : entretien à la charge de l'Etat par
le biais des Directions interdépartementales des routes (DIR) depuis 2007.
Route nationale / réseau routier national non concédé : bornes kilométriques
rouges sous le format « N + un numéro ». Entretien à la charge de l'Etat
par le biais des Directions interdépartementales des routes (DIR) depuis
2007.
Route départementale : bornes kilométriques jaunes sous le format « D
+ un numéro ». Entretien à la charge des conseils départementaux.
Voie communale (ex chemin vicinal « à l'état d'entretien » – mention n'ayant
plus de valeur juridique) intégrée au domaine public communal, par ordonnance
du 7 janvier 1959. Entretien à la charge de la commune, parfois de la
communauté de commune ou d'une métropole.
Chemin rural (ex chemin vicinal – mention n'ayant plus de valeur juridique)
: entretien selon le souhait du maire car cette voie est du domaine privé
de la commune et à ce titre peut faire l'objet d'une vente dans le privé.
Cession gratuite interdite. Prix fixé par les Domaines.