Les "Grésillons" étaient des bateaux à voile que l'on voyait
voguer dans la rade de Brest par dizaines - chaque région côtière avait
sa forme de grésillon selon les conditions locales de navigation. Souvent
ces barques à deux mâts et deux voiles traversaient le plan d'eau de port
en port. Brest, Landerneau, Lanvéoc... Et le Fret, port d'entrée des marchandises
dont le charbon. Au 19ème siècle, on ne se fait pas livrer du charbon
mais des hectolitres de grésillon. Le combustible se présente sous la
forme de petits "graviers" de coke qui grésillent au contact du feu. Différents
calibres sont à vente : gros criblé, n°1, n°zéro, poussier et grésillon.
Ainsi le grésillon appartient davantage aux résidus qu'à un produit combustible
de qualité mais les Presqu'îliens sont pauvres et seuls quelques familles
favorisées peuvent s'offrir ce modeste luxe d'autant que le bois
de chauffe est rare.
Pour vivre, il ne suffit pas à ces marins qui rament dur quand il n'y
a pas de vent, de transporter du grésillon, les cargaisons sont composées
aussi, à la demande des grossistes de Brest, de toute denrée espérée en
presqu'île et inversement des marchandises quittent la presqu'île pour
être vendue à Brest. Les céréales, le chanvre, des briques de terre cuite...
Ces longues barques font aussi office de bateaux sabliers. Au 19ème siècle,
l'introduction du sable dans la construction de bâtiment consomme des
quantités importantes de sables marins collectés dans la rade.
Avant l'existence des cales et des quais portuaires, il fallait échouer
la barque sur la grève et faire un déchargement rapide à dos d'homme en
traversant la vase ou les rochers glissants jusqu'aux pieds des magasins
côtiers qui attendaient les approvisionnements. Quelques grossistes remportaient
les livraisons dans des voitures à cheval pour livrer le bourg de Crozon.
Les grésillons étaient un maillon fort de l'économie jusqu'à ce que les
bateaux à vapeur, et bateaux à moteur ne viennent destituer cette hégémonie
ancestrale. L'intensification de certaines pêches nouvelles des pétoncles
et des coquilles Saint-Jacques en rade vont atténuer la désespérance de
ces transporteurs infatigables contraints de devenir pêcheurs sur des
coquilliers. Heureuse mutation qui ne durera qu'un temps.
Les grésillons de la rade de Brest étaient fragiles et ne duraient que
quelques années et semblent avoir disparu sans laisser d'abondantes traces.
Les peintres trop rares à l'époque préféraient représenter les navires
de la Royale au mouillage. La flotte de guerre immobile était prestigieuse
et forçait l'admiration, et les grésillons qui tournaient autour des vaisseaux
pour se frayer un passage de livraison paraissaient si dérisoire qu'ils
n'attirèrent que peu l'attention.
A noter : le mot grésillon a plusieurs autres significations selon les régions.
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